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Wednesday, July 29, 2015

Déchainement anti-kurde

A peine quelques jours sont-ils passés depuis que les Turcs se sont engagés aux côtés de « la coalition internationale contre le terrorisme » que les observateurs et les commentateurs commencent à se demander sur les réelles intentions d’Ankara. Il est vrai que l’armée turque a bombardé quelques positions de Daech en Syrie sans que l’on sache exactement leurs degrés de précision et d’efficacité, et sans qu’on ait la moindre idée sur le prix payé par les terroristes du fait du changement de la politique de la Turquie qui, soudain, s’est transformée d’un atout principal en un adversaire déclaré des daéchiens. Sans doute est-il encore tôt d’avoir une idée précise et de juger, mais une chose est sûre : les combattants kurdes du PKK (le parti des travailleurs du Kurdistan d’Abdallah Oçalan) ont reçu beaucoup plus de bombes que les terroristes de Daech. Pourtant, le PKK respectait la trêve conclue avec Ankara et qui tenait depuis trois ans. Pour comprendre la nouvelle politique des dirigeants islamistes de Turquie, il faut avoir présents à l’esprit quelques éléments importants. Tout d’abord les élections législatives du 7 juin dernier ont été catastrophiques pour le KDP, le parti islamiste d’Erdogan. Non seulement, il a perdu la majorité qui lui a permis de gouverner la Turquie depuis 2002, mais il a vu la surprenante émergence du parti démocratique des peuples, composé d’organisations et d’associations kurdes, qui a raflé pas moins de 80 sièges. Mais avant cela, et alors que la Turquie était en pleine campagne électorale, les dirigeants islamistes turcs ne cachaient pas leur frustration et leur déception face à la victoire remportée par les Kurdes syriens à Kobani, la fameuse ville kurde du nord de la Syrie, d’où les terroristes de Daech ont été expulsés. Les autorités islamistes de Turquie ont tout fait pour aider les terroristes à occuper Kobani, mais les Kurdes ont pu résister et infliger une défaites cuisantes aux mercenaires du « Calife » Abou Bakr Al Baghdadi Visiblement le prestige international dont se sont auréolés les Kurdes syriens et irakiens grâce à leur combat victorieux contre les terroristes de « l’Etat islamique » a accru le stress et les inquiétudes des dirigeants turcs qui craignent que ce prestige ne galvanise les ambitions des Kurdes de se regrouper au sein d’une entité politico-ethnique. Ces ambitions sont un souci obsessionnel pour les dirigeants turcs qui, utilisant le prétexte de l’attentat perpétré par Daech contre la vile de Suruç, s’engagent dans la lutte contre le terrorisme. Cela fait près de cinq ans que les organisations terroristes islamistes (Al Qaida, Daech, Jabhet Annusra) se déchainent, mettant à feu et à sang le Moyen-Orient et l’Afrique du nord, sans oublier les ravages de Boko Haram au sud du Sahara. Cela fait près de cinq ans que ces organisations sèment la mort et la destruction parmi les musulmans, sunnites et chiites confondus. Les morts se comptent en centaines de milliers, et les déplacés, les déracinés et autres réfugiés se comptent en millions. Face à ce bilan terrifiant, et tout au long de ces années de braise, le PKK, bien que son chef Oçalan soit détenu depuis 18 ans, n’a pas commis le moindre attentat et respectait scrupuleusement le processus de paix engagé depuis trois ans. Le premier attentat commis par le PKK remonte seulement à quelques jours. Deux policiers turcs ont été tués par le PKK qui les accuse de « collaboration » avec les terroristes de Daech dans l’attentat de Suruç contre les Kurdes. Et pourtant, le gros des efforts guerriers des autorités turques sont orientés beaucoup plus vers le PKK plutôt que vers les vrais terroristes. Des manifestations quotidiennes se déroulent à Istanbul, dénonçant la politique à la fois répressive contre les Kurdes et complaisante à l’égard des terroristes islamistes. Ce n’est pas par hasard ni par démagogie que l’un des slogans principaux des manifestants d’Istanbul est « l’AKP complice des Djihadistes ». Encore une fois, les Etats-Unis se mettent dans une situation inextricable, difficile à gérer et dommageable à leurs intérêts et à leur réputation. Parce que les autorités turques leur ont ouvert la base militaire d’Incirlic, ils n’ont pas hésité un instant à approuver les bombardements au nord d’Erbil et de Dohuk, ce qui constitue à la fois une agression contre un pays voisin, l’Irak, et une violation de la trêve conclue avec le PKK. Mais ce n’est pas le plus grave ni le plus étonnant, car les Etats-Unis ont depuis belle lurette habitué le monde à une donnée fondamentale de la réalité internationale : quand ils n’agressent pas eux-mêmes, ils s’alignement systématiquement du côté des agresseurs. Le plus grave est que, dans la campagne de mobilisation contre le terrorisme daéchien qu’ils mènent tambour battant, les Etats-Unis se retrouvent dans la situation abracadabrante où deux ennemis irréductibles, la Turquie et les Kurdes, doivent coordonner leurs efforts pour combattre Daech. Si pour les Kurdes de Turquie, d’Irak et de Syrie, les terroristes daéchiens constituent une menace existentielle, pour la Turquie officielle ce sont les Kurdes, à quelque pays qu’ils appartiennent, qui présentent une menace bien plus grande que le terrorisme islamiste. Comment, dans leur stratégie anti-terroriste, les Etats-Unis vont-ils s’y prendre pour résoudre cette quadrature du cercle ? Aujourd’hui, mardi 28 juillet, l’Otan, qui assume une lourde responsabilité dans le déferlement de la vague terroriste, va se réunir pour étudier la demande d’aide de la Turquie dans sa lutte contre le… PKK. Les terroristes de Daech et leur « Calife » doivent prier jour et nuit pour que Dieu donne longue vie à leurs protecteurs turcs. Surtout qu’aux dernières informations, les milices kurdes qui ont expulsé les daéchiens de Kobani, ont subi hier lundi de lourds bombardements venant de Turquie…

Monday, July 27, 2015

Le réveil tardif d'Erdogan

Fin juin 2015, le gouvernement islamiste turc envoie sa police réprimer à coups de matraques et de bombes lacrymogènes une grande manifestation de la Gay Pride organisée par les homosexuels à Istanbul. L’incident n’a pas provoqué de grandes réactions de protestations ni à l’intérieur ni à l’extérieur de la Turquie. L’incident n’a pas étonné grand monde non plus, compte tenu de la nature du pouvoir politique turc dont les attitudes sont dictées dans une large mesure par des considérations religieuses. 17 juillet 2015, un millier de Daéchiens se rassemblent dans une place publique du quartier d’Omerli à Istanbul pour la prière de l’Aid. La prière s’est transformée ensuite en meeting politique où l’un des chefs de Daech en Turquie, Halis Bayancuk, dit Abu Hanzala, s’est même permis de galvaniser les pro-daéchiens et d’attiser leur hostilité contre le gouvernement turc, la police se contentant d’observer le manège les bras croisés. Tout comme l’attitude agressive contre la Gay Pride, l’attitude passive de la police vis-à-vis des daéchiens n’a pas étonné grand monde, compte tenu du « faible » que ressentent les responsables islamistes turcs vis-à-vis des égorgeurs de l’ « Etat islamique ». 20 juillet 2015, les daéchiens ne peuvent plus attendre. Ils doivent remercier coûte que coûte les autorités turques pour l’aide qu’elles leur ont apportée pendant des années dans leurs guerres en Syrie et en Irak. Le remerciement viendra sous forme d’une manifestation de gratitude explosive si l’on peut dire : un attentat-suicide en Turquie même, dans la ville de Suruç, fit une trentaine de morts et une centaine de blessés. Mais l’extraordinaire stupidité de Daech ne s’arrête pas là. Jeudi 23 juillet, les terroristes ouvrent le feu sur un poste frontalier turc tuant un sous-officier et blessant deux soldats. Cette fois s’en était trop, et Erdogan qui se trouve dans la situation passablement ridicule de l’arroseur arrosé, ne peut plus poursuivre la même politique qui, pendant trois ou quatre ans a fait de la Turquie le pilier sur lequel repose Daech et le poumon par lequel respirent les hordes terroristes. Vendredi 24 juillet très tôt le matin, trois chasseurs F16 de l’armée de l’air turque ont bombardé deux quartiers généraux et un point de ralliement des terroristes de Daech avec des missiles avant de regagner leur base de Diyarbakir. Ce changement majeur de la politique turque dans la région risque d’être fatal aux terroristes et bénéfique pour tous ceux qui, de l’Irak au Maroc, combattent le fléau du terrorisme. Mais pourquoi les « stratèges » de l’ « Etat islamique » se sont-ils sentis obligés de mordre la main qui les a nourris tout au long de leurs guerres contre les régimes irakien et syrien ? En fait, des termes tels que ‘alliance’, ‘fidélité’, ’ gratitude’, ‘rationalité’ n’existent pas dans le lexique de l’islam politique violent. Les Etats-Unis, après avoir armé et financé très généreusement pendant des années l’islamisme violent en Afghanistan, avaient été désastreusement payés de retour le 11 septembre 2001. Quant à l’Arabie saoudite qui se croit dépositaire de l’unique version valable de l’islam, elle a subi et continue de subir dans sa chair les conséquences de sa politique catastrophique en Afghanistan, au Pakistan et dans bien d’autres pays musulmans. L’histoire retiendra peut-être que le 20 juillet 2015, les « stratèges » de Daech, fanatisés jusqu’à la moelle, ont commis l’erreur fatale qui va signer leur fin. L’oxygène par lequel les terroristes daéchiens respirent leur venait de Turquie. De toute évidence, sans le gouvernement islamiste de ce pays, sans la haine irrationnelle que ressent Erdogan pour le régime syrien, Daech n’aurait jamais été ce qu’il est aujourd’hui, n’aurait jamais pu accueillir autant de terroristes qui accouraient des quatre coins du monde pour rejoindre ses rangs, n’aurait jamais été si bien armé et si bien financé, n’aurait jamais pu écoulé le pétrole des puits syriens et irakiens tombés sous sa domination. Autant d’avantages qui risquent de s’évaporer suite à la perte de leur précieux soutien : la Turquie. A ce niveau, on peut dire qu’à quelque chose malheur est bon, et que les martyrs tombés dans l’attentat de Suruç auront contribué, honneur posthume, à arrêter le carnage daéchien. Quelles conclusions tirer de ces événements qui s’emballent à une vitesse vertigineuse ? Tout d’abord que le changement radical de la politique turque vis-à-vis de Daech ne s’explique pas par une quelconque prise de conscience de la part des dirigeants islamistes turcs de l’étendue des dégâts provoqués par les terroristes de l’ « Etat islamique », mais par l’extraordinaire stupidité de celui-ci, une stupidité à la fois fatale pour Daech et salvatrice pour tous ceux qui s’opposent à son extension. Ensuite, ces événements montrent l’étendue de l’irresponsabilité des dirigeants islamistes turcs qui ne pouvaient pas ne pas être conscients de l’énormité du danger et de l’immensité des dégâts provoqués par les hordes terroristes. Malgré cela, ils ont jugé utile et nécessaire de verser de l’huile sur le feu tant qu’il brûle les autres. Ils ont changé de politique seulement le jour où ce feu a franchi leur frontière et les a brûlés. A ce niveau, on peut dire que la stupidité politique des dirigeants islamistes de Turquie n’a rien envier à celle de Daech. Rien d’étonnant à cela. Celui-ci et ceux-là ont en commun le même objectif ultime et partagent les mêmes références puisées dans l’islam politique.

Wednesday, July 22, 2015

Des fous à lier

Après des années de négociations marathoniennes et exténuantes, les 5+1 et l’Iran sont finalement arrivés à un accord sur le dossier complexe du nucléaire iranien. Un soupir de soulagement presque général a été poussé à travers le monde. Presque général, car Israël, obnubilé par le délire de son Premier ministre, pense que certaines clauses de l’accord contiennent une condamnation à mort implicite de l’Etat hébreu. Presque général, car l’Arabie saoudite et certains pays du Golfe pensent que l’accord donne des ailes à leur pire ennemi et accroit ses «capacités de nuisance » dans la région. A part ceux-là, pratiquement tout le monde est soulagé de voir enfin les Etats-Unis et l’Iran, à couteaux tirées depuis plus d’un tiers de siècle, résoudre enfin leur contentieux et s’apprêter à normaliser leurs relations. Mais le contentieux irano-américain est-il réellement résolu ? Aux Etats-Unis, il y a des forces qui ont tout fait pour faire échouer les négociations et qui se mobilisent actuellement pour saboter l’accord, la force principale étant le groupe des parlementaires républicains au Congrès. Ceux-ci, c’est connu, obéissent au doigt et à l’œil à Sheldon Adelson, un richard juif américain, « propriétaire » de leur parti, selon l’expression du journaliste israélien, Uri Avnery. Celui-ci n’a pas tout à fait tort, car les centaines de millions de dollars déboursés par celui-là au profit du parti républicain, font de lui un homme à la fois craint, respecté et obéi par tout républicain soucieux de sa carrière politique. Sheldon Adelson, bras droit d’Israël aux Etats-Unis, est contre l’accord, donc le parti républicain ne peut pas être pour l’accord et est en tain de mobiliser ses troupes au Congrès dans le but de faire échouer l’accord par un vote négatif. Ce qu’il faut remarquer ici est que la puissance combinée de Sheldon Adelson et de l’AIPAC (American Israeli Public Affairs Comittee) n’a pu, en dépit des moyens énormes déployés, empêcher l’administration Obama d’aller de l’avant et de poursuivre sa stratégie de normalisation avec l’Iran. Cet échec confirme la réduction de l’influence des groupes de pression pro-israéliens et de leur incapacité grandissante à imposer leurs vues à l’Exécutif américain, surtout quand il est géré par les démocrates. Les groupes de pression pro-israéliens pourront-ils se rattraper en bloquant l’accord avec l’Iran par le vote attendu dans deux mois au Congrès ? En fait le Lobby israélien a peu de chances de bloquer l’accord pour une raison bien simple. Dans le cas d’un vote négatif au Congrès, le président Obama est autorisé par la Constitution à opposer son veto. Dans ce cas de figure, le Congrès ne pourra annuler le veto présidentiel qu’avec une majorité des deux tiers du Congrès, ce qui est pratiquement impossible. En attendant l’issue de ce bras de fer américano-américain, penchons-nous un peu sur le tohu-bohu provoqué pendant de longues années par cette question parfaitement ridicule du nucléaire iranien. Si un Extraterrestre suivait disons par Skype à partir de chez lui les péripéties de cet imbroglio nucléaire irano-occidental de 2005 à 2015, il prendrait fort judicieusement tous les Terriens pour des fous à lier. Car ce que constaterait notre Extraterrestre est qu’un ensemble de pays, extrêmement puissants économiquement et disposant ensemble de milliers de têtes nucléaires capables de détruire trente fois la Terre, sont pris d’une panique irrationnelle par un millier de centrifugeuses et de quelques réacteurs nucléaires expérimentaux détenus par un pays à genoux sous le poids écrasant d’interminables sanctions internationales. Ce que constaterait aussi notre Extraterrestre est que des pays géographiquement proches de l’Iran (Pakistan, Inde) disposent chacun de sa bombe nucléaire sans que cela n’empêche le moindre Terrestre de dormir sur ses deux oreilles. Enfin, cerise sur le gâteau, ce que constaterait notre observateur lointain est qu’un pays minuscule de cinq millions d’habitants et disposant d’un minimum de deux cents têtes nucléaires, n’a pas cessé une décennie durant de remuer ciel et terre et de provoquer une pollution sonore infernale par ses cris stridents face à ce qu’il appelle « le danger mortel de la bombe iranienne ». Après cela, quel Terrien honnête peut-il en vouloir sérieusement à notre Extraterrestre de nous traiter de fous à lier ? Mais supposons un instant, que l’Iran a réussi à fabriquer sa bombe et à occuper un petit strapontin dans le club nucléaire. Une chose est sûre, le ciel ne nous serait pas tombé sur la tête. Un Iran avec la bombe nucléaire ne serait pas plus dangereux que le Pakistan ou l’Inde. Il ne serait sûrement pas plus dangereux qu’Israël, sans parler des grands détenteurs d’armes de destruction massive que sont les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU. L’argument auquel Netanyahu s’accroche désespérément est que l’Iran est dirigé par des « mollahs fous et irrationnels ». En fait pour savoir de quel côté se trouve la folie et l’irrationalité, il suffit de comparer les politiques engagées par les dirigeants d’Israël et les mollahs d’Iran pendant les trente dernières années. Ceux-là ont fait de la guerre, de l’agression et de l’occupation le trépied de leur politique depuis des décennies. Ceux-ci, depuis leur arrivée au pouvoir en 1979, n’ont occupé personne et n’ont agressé personne. La guerre irano-irakienne de 1980 est l’une de fautes historiques de Saddam Hussein qui, encouragé par les Américains, avait commis l’immense erreur d’entrer en guerre contre son voisin pour découvrir que ceux qui l’avaient encouragé, vendaient des armes à la fois aux Irakiens et aux Iraniens… Cela dit, Netanyahu a un peu raison de crier sur les toits que l’Iran peut tricher, frauder et tromper l’Occident au sujet de la bombe. Car, le type sait de quoi il parle. Son propre pays a pendant des années triché, fraudé et trompé le monde entier au sujet de la même bombe. Et un beau jour, on a découvert qu’Israël est assis sur un arsenal de deux cents têtes nucléaires.

Wednesday, July 15, 2015

Filière du bavardage lucratif

Il est très courant aux Etats-Unis que des personnages publics qui se sont fait un nom en politique en profitent pour accumuler des richesses sans consentir le moindre effort, sans verser une seule goutte de sueur et sans fournir concrètement un produit ou un service en contrepartie du chèque encaissé. En d’autres termes, des politiciens qui se sont bâti une réputation en commettant plus de mal que de bien au cours de leur carrière, se font grassement payer pour une heure de bavardage devant un micro. Cette filière du bavardage est très lucrative et a permis à d’anciens responsables politiques, pas seulement aux Etats-Unis, de devenir multimillionnaires. La presse américaine vient de donner une estimation de ce que les Clinton, Bill et Hillary, ont gagné en quelques centaines d’heures de bavardage dans des conférences banales et insipides : 100 millions de dollars. Même leur fille Chelsea est entrée dans la danse en donnant des conférences Dieu sait sur quoi avant d’encaisser des chèques avec lesquels elle contribue aux efforts de ses parents de reconquérir la Maison blanche… Même si cette filière du bavardage lucratif est née et fleurit aux Etats-Unis, la palme d’or ne revient pas à un Américain, mais à un Britannique. D’après les chiffres consultables sur le net, c’est l’ancien Premier ministre de Sa Très Gracieuse Majesté, Tony Blair, qui détient le record du bavardage le plus chèrement payé. En 2009, Blair avait donné une conférence d’une heure aux Philippines, l’un des pays les plus pauvres du monde, pour laquelle il était payé 616.000 dollars, soit plus de dix mille dollars par minute de bavardage. En 2009, la guerre d’Irak était déjà à sa sixième année et l’ancien Premier britannique était, ne l’oublions pas, l’un des principaux responsables de cette catastrophe de proportions bibliques. Si l’on revenait aux archives de la guerre d’Irak, on pourrait déterminer combien d’actes terroristes étaient commis, combien de voitures piégées avaient explosé et combien de citoyens irakiens avaient perdu la vie par la faute de cet homme au moment où il conférait aux Philippines pour plus de dix mille dollars/minute. Que peut dire un tel individu avec des millions de morts et de déplacés sur la conscience pour être si chèrement payé ? C’est l’une des bizarreries affligeantes de ce monde fou. Mais revenons aux Etats-Unis. Clinton n’est pas l’unique locataire de la Maison blanche à tirer profit de son Curriculum Vitae et de le rentabiliser de manière lucrativement indécente ou indécemment lucrative. Ronald Reagan qui avait occupé la Maison blanche entre 1980 et 1988 n’avait pas perdu de temps après avoir cédé le poste présidentiel à Bush -père. En 1989, il avait fait une tournée au Japon où il a avait donné une série de conférences tout en se faisant grassement payer. Que Reagan ou Clinton profitent de cette filière pour arrondir leur fin de mois de retraités privilégiés, ça n’a pas l’air de choquer ou de déranger grand monde, même si beaucoup trouvent cela assez indécent. Mais l’indécence prend des proportions stupéfiantes quand George W. Bush s’engouffre lui aussi dans cette filière du bavardage lucratif. Après avoir transformé l’Irak en enfer, il a eu la bonne idée de se faire oublier en s’adonnant à la peinture dans son ranch texan. Il avait déjà fait les portraits du russe Poutine, de la germanique Merkel, du britannique Blair, de lui-même, de son père George Herbert Bush et même du Dalai Lama qui, en voyant son portrait, n’était pas particulièrement impressionné par les talents de Bush, si l’on en croit la presse américaine. Même sans talents exceptionnels, Bush aurait dû rester dans son atelier de peinture plutôt que d’aller faire des discours devant des soldats américains dont beaucoup ont vu leur vie détruite en perdant la capacité de marcher, de voir, d’entendre ou de parler suite à de graves blessures subies dans la guerre d’Irak. George W. Bush a eu l’outrecuidance d’aller faire un discours devant des soldats qu’il a envoyés guerroyer à dix mille kilomètres de chez eux. Avec un peu de décence, il serait resté chez lui au lieu d’aller réveiller de mauvais souvenirs. Car dans sa guerre basée sur un mensonge, des milliers de soldats américains ont perdu la vie ou ont laissé sur le champ de bataille leur intégrité physique et psychique. Mais on reste pantois en apprenant que non seulement Bush a eu l’indécence d’aller faire un discours là où il devrait avoir honte de se montrer, mais il s’est fait payer 100.000 dollars pour son discours, sans compter 20.000 dollars de frais du jet privé qui l’avait transporté vers le lieu de la conférence. Cette information donnée par la chaine ABC le mercredi 8 juillet a fait l’effet d’une bombe chez beaucoup d’Américains, même si l’on s’attend à tout de la part du « pire président » de l’histoire américaine. Ecoutons la réaction écœurée de la journaliste américaine, Lucy Steirgerwald : « Nous pourrions ne pas être en mesure d’arrêter les guerres, mais nous devrions certainement arrêter de payer des sommes faramineuses à des parasites qui viennent bomber le torse devant la foule. C’est déjà plus que suffisant de les payer pendant quatre ou huit ans pendant leur séjour à la Maison blanche. Demandez ce qu’en pense un soldat américain invalide. Ou mieux encore, demandez à citoyen irakien ce qu’il en pense. »

Petitesse, médiocrité et désir de vengeance

Il y a seulement dix mois, le HCR comptait 3 millions de réfugiés syriens. Aujourd’hui, ils sont quatre millions, sans compter les 270.000 qui ont déposé une demande auprès des pays européens. Ceci pour les Syriens qui errent en dehors de leur pays. Ceux qui ont fui leur village ou leur ville sans pouvoir quitter le pays, leur nombre est plus élevé. 7,6 millions de citoyens syriens qui sont déracinés. On les appelle dans le langage humanitaire international : « les déplacés de l’intérieur ». En comptant les déplacés de l’intérieur et ceux de l’extérieur, on découvrira avec consternation que plus de la moitié du peuple syrien est aujourd’hui déracinée. Mais les choses ne s’arrêtent pas là. Le plus grave est que la Syrie est en train de vivre dans l’impuissance totale le sacrifice de toute une génération. Des millions d’enfants en âge de scolarisation n’ont pas mis les pieds dans un établissement d’enseignement depuis 5 ans. Certains d’entre eux ne savent même pas ce que veut dire ‘école’ et n’ont aucune idée sur ce que signifie le mot ‘espoir’. Ils n’ont guère le choix qu’entre survivre dans les conditions infrahumaines des camps des réfugiés ou se faire prendre dans les filets des rabatteurs du terrorisme islamiste. La situation de ceux qui ont pu éviter le déracinement n’est pas plus enviable. Ils vivent au rythme hautement déstabilisant de la guerre. Une guerre atroce entre un régime qui tente par tous les moyens à sa disposition de sauver ce qui reste de la Syrie et des groupes terroristes qui tentent de leur côté de détruire ce qui reste encore intact de ce pays meurtri. Aucune lueur d’espoir ne se profile à l’horizon. Aucune perspective de règlement pacifique du conflit syrien et aucune chance pour l’une ou l’autre des parties en guerre pour l’emporter sur le terrain et mettre fin au conflit par une victoire militaire totale. Tout porte à croire que l’enfer syrien risque encore de durer longtemps et que du sang et des larmes continueront à être versés. Ce pessimisme que beaucoup partagent se justifie par l’obstination de certains pays de la région à continuer à verser de l’huile sur le feu. Il se justifie par la démission des membres influents de la communauté internationale qui, pour ne pas avoir l’enfer syrien sur la conscience, préfèrent tourner le dos et regarder ailleurs. On aurait souhaité les voir frapper un grand coup sur la table et intimer l’ordre à la Turquie et au Qatar principalement de mettre fin à leur politique de la terre brûlée en Syrie. On peut bien se creuser la cervelle et se torturer les méninges pour savoir quel intérêt a la Turquie dans la mise à feu et à sang de son voisin du sud. En vain. Car enfin quel intérêt a la Turquie à abriter sur son sol 2 millions de réfugiés syriens. Quel intérêt l’économie et la sécurité turques tirent-elles de la présence de cette masse humaine déracinée ? Quelle réputation la Turquie affiche-t-elle dans le monde en ouvrant largement ses frontières aux terroristes de tous bords et en leur facilitant le passage en Syrie ? Si la Turquie n’a aucun intérêt de quelque nature que ce soit dans la mise à feu et à sang de son voisin, pourquoi son gouvernement continue-t-il dans cette voie désastreuse ? La réponse est peut-être d’ordre psychologique. Erdogan est incontestablement l’artisan et l’architecte de la politique syrienne de la Turquie. Pourquoi est-il si fanatiquement obstiné à vouloir renverser le régime syrien bien que son pays n’a ni un intérêt économique, ni un intérêt politique, ni un intérêt sécuritaire à tirer ? Erdogan devait être un étudiant avec des convictions islamistes en 1982 quand Hafez Al Assad, le père de Bashar, réprima dans le sang la révolte de Hama fomentée à l’époque par les Frères musulmans syriens. On imagine le choc subi et la haine ressentie par Erdogan vis-à-vis du régime syrien et de tous ses représentants, et en premier lieu Assad père et fils. On ne peut pas expliquer la politique actuelle d’Erdogan vis-à-vis de la Syrie sans revenir un tiers de siècle en arrière et sans se remémorer cet événement tragique de Hama. Elaborer une ligne de conduite tout en étant guidé par le désir de vengeance est très courant en politique. Sauf que ce genre de conduite n’est pas le propre des grands hommes, mais des petits. Contribuer au malheur de millions d’hommes, de femmes et d’enfants innocents rien que pour assouvir un désir maladif de vengeance relève d’une pathologie dont Erdogan n’est pas le seul à en souffrir. Il est terrible de constater que les drames bibliques que vivent l’Irak depuis douze ans et la Syrie depuis 5 ans s’expliquent dans une large mesure par le désir de George W. Bush de venger l’attentat supposé qui aurait été fomenté par Saddam contre son père, et par le désir d’Erdogan de venger les morts de Hama en jurant la perte du régime syrien qu’il tient pour responsable. Beaucoup de grands drames historiques s’expliquent par la présence d’hommes politiques petits et médiocres au mauvais endroit et au mauvais moment.

Friday, July 10, 2015

Il était une fois deux grands criminels

Il y a dix ans presque jour pour jour, le 7 juillet 2005, Londres était frappé par une série d’attentats suicides qui ont visé les transports publics. Ce jour là vers 9 heures du matin, trois kamikazes se font exploser, en l'espace de 50 secondes, dans trois rames de métro. Une demi-heure plus tard, un quatrième kamikaze se fait exploser dans un autobus. L'attaque se solde par 52 morts et 700 blessés. Une décennie plus tard, le 26 juin 2015, un attentat terroriste perpétré à Sousse fait 38 morts parmi les touristes ; la majorité des victimes sont des sujets de Sa Très Gracieuse Majesté. Il n’en faut pas plus pour convaincre les Britanniques que leur pays est en tête de liste des pays visés par le terrorisme islamiste. Au lendemain du crime terroriste de Sousse, le Premier ministre britannique, David Cameron, a exprimé le sentiment général qui prévaut chez ses concitoyens. Pour lui, comme pour beaucoup de Britanniques, la Grande Bretagne fait face à « une menace existentielle ». Sous l’effet de l’émotion, de la révolte et de la colère engendrées par l’assassinat de sang froid d’une trentaine de ses concitoyens sur une plage tunisienne, il est allé jusqu’à imaginer qu’un pays aussi puissant que la Grande Bretagne puisse être menacé dans son existence par des groupes de terroristes-assassins armés de Kalachnikovs, de ceintures d’explosifs ou conduisant des voitures bourrées d’explosifs. Si de petits pays comme la Libye, la Syrie ou la Tunisie peuvent être effectivement menacés dans leur existence par cette peste des temps modernes, ce n’est sûrement pas le cas de la Grande Bretagne qui a les moyens de sa puissance et est en mesure de protéger son existence en tant qu’Etat institutionnel, démocratique et prospère. Mais si l’Etat britannique est en mesure de protéger l’existence et la pérennité du pays, il est loin d’être capable d’assurer la pleine sécurité à tous les citoyens, comme l’ont démontré de manière dramatique les attentats du 7 juillet 2005 et du 26 juin 2015. Il va sans dire que cette vulnérabilité au terrorisme n’est pas une particularité britannique. Vu l’état de la planète, on peut dire que la vulnérabilité au terrorisme est devenue aujourd’hui une caractéristique mondiale. En d’autres termes, aucun pays du monde n’est aujourd’hui à l’abri de la menace terroriste qui prend des proportions planétaires. La Grande Bretagne assume-t-elle une responsabilité dans cette vulnérabilité du monde à la menace terroriste. Sans doute, et cette responsabilité vient même en seconde position après celle des Etats-Unis d’Amérique. Revenons un peu en arrière, plus précisément en 2002, l’année de tous les dangers. Tout au long de cette année, le tandem Bush-Blair a leurré, bluffé, menti et falsifié la réalité dans le but d’intervenir en Irak et de détruire le régime irakien. Le cheval de bataille de ce tandem infernal à l’époque était … la lutte contre le terrorisme. Une extraordinaire machine médiatique était mise en branle à l’époque pour convaincre le monde que l’Irak soutenait le terrorisme mondial et que le couple Bush-Blair, en se préparant à détruire le régime irakien, était en train de défendre la paix du monde. On prétendait alors qu’en mettant Saddam et son régime hors d’état de nuire, on asséchait les sources du terrorisme et on préparait la planète à des lendemains qui chantent. Aujourd’hui, on a assez de recul pour tirer au moins deux conclusions indubitables. La première conclusion est que Bush-Blair s’étaient comportés en fossoyeurs de la paix mondiale, et à ce titre, ils occupent une place de choix dans la liste des grands criminels de l’histoire. La deuxième conclusion est que, loin de soutenir le terrorisme, Saddam Hussein et son régime, en dépit de leurs immenses défauts et des grandes erreurs commises, constituaient un véritable barrage contre ce fléau. En 2002, Bush et Blair répétaient ad nauseum que le régime de Saddam constituait la plus grande menace pour la paix mondiale. Des dizaines de milliers d’attentats et des millions de morts et de déplacés plus tard, tout le monde sait aujourd’hui qu’à travers leurs dirigeants incompétents et irresponsables, les Etats-Unis et la Grande Bretagne assument une responsabilité fondamentale dans l’anarchie destructrice qui sévit aujourd’hui dans plusieurs régions du monde. Ces deux pays assument une immense responsabilité politique et morale dans le spectacle cauchemardesque que le monde donne actuellement de lui-même. Aujourd’hui, les Britanniques commémorent les attentas du 7 juillet 2005 et du 26 juin 2015. Des milliers défileront à Hyde Park et assisteront à un service religieux à la Cathédrale Sain Paul. Ce défilé rappelle un autre beaucoup plus grand, celui du 15 février 2003 où 10 millions de personnes avaient défilé simultanément dans plusieurs villes du monde, dont un million à Londres, pour protester contre la guerre imminente que Bush et Blair se préparaient à déclencher contre l’Irak. Cette immense mobilisation internationale n’avait pas réussi à empêcher la guerre anglo-américaine contre un pays à genoux et un peuple à bout de souffle. Les manifestations géantes du 15 février n’avaient pu empêcher le coup de pioche fatal asséné par le tandem Bush-Blair aux fondations de la paix mondiale. Par un mélange explosif d’incompétence, de fanatisme et de messianisme, Bush et Blair avaient ouvert la voie à un fléau qui allait s’étendre comme une trainée de poudre aux cinq continents et menacer comme jamais auparavant les 193 pays membres de l’ONU.

Thursday, July 09, 2015

La migraine et le cancer

Depuis l’entrée du monde arabe dans une période de grande turbulence en 2011 et jusqu’à une date très récente, les pays du Golfe, en particulier le Qatar et l’Arabie Saoudite, faisaient la pluie et le beau temps au sein la Ligue arabe. Par exemple, le nom de Bashar al Assad était tabou et personne n’osait le prononcer. Le Qatar et l’Arabie Saoudite ont même imposé au sommet de Doha de mars 2013 l’attribution du siège de Damas à l’opposition armée syrienne, un cadeau assorti du « droit pour les pays membres de fournir des armes aux rebelles ». Les choses ont commencé à changer un an plus tard. Pendant le sommet du Koweït en mars 2014, sous la pression de l’Egypte, de l’Algérie, de l’Irak et du Liban, le siège de la Syrie était retiré à l’opposition pour rester vacant depuis. Il y a quelques jours, cette tendance a connu un grand développement. Alors qu’il s’apprêtait à s’envoler pour Moscou pour assister à la réunion du Comité des Nations Unies pour les droits des Palestiniens, le Secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil Al Arabi, a surpris tout le monde en affirmant sa prédisposition à rencontrer les autorités syriennes, et il a cité nommément le ministre syrien des Affaires étrangères Walid Al Moallem. De là à interpréter cette affirmation comme un avant-goût d’une prochaine normalisation des relations de la Ligue avec le régime syrien, beaucoup au sein de l’opposition syrienne ont franchi le pas sans cacher leur colère. Il va sans dire que Nabil Al Arabi ne pourrait pas se permettre un tel changement d’attitude s’il n’avait pas l’aval des membres de la Ligue ou au moins l’aval des membres les plus influents. Comment ce revirement de la Ligue en faveur de la Syrie a-t-il été rendu possible ? Il est à rappeler que depuis le déclenchement des événements sanglants de Syrie en mars 2011, les trois pays principaux qui se sont dépensés sans compter contre le régime syrien sont le Qatar, l’Arabie Saoudite et la Turquie. Cette dernière n’est pas membre de la Ligue et ses motivations sont différentes de celles des deux premiers pays. Pour les dirigeants islamo-conservateurs turcs, le danger ne vient pas des terroristes opérant en Irak et en Syrie, mais des Kurdes qui, selon les autorités d’Ankara, attendent impatiemment l’occasion de créer leur Etat. Le Qatar, qui abrite la plus grande base militaire en dehors des Etats-Unis, n’a pas d’agenda propre, mais s’est fait et se fait encore l’instrument de l’agenda américain qui n’a pas changé depuis que la conseillère à la sécurité nationale de George W Bush, Condolezza Rice, l’avait dévoilé en 2006 : généralisation de l’ « anarchie créatrice » dans le monde arabe. Depuis, le Qatar n’a pas cessé de se faire l’instrument efficace de cet agenda en aidant matériellement et médiatiquement par le biais de la chaîne ‘Al Jazeera’ toute organisation capable de mener la vie dure au régime de Bashar al Assad et d’entretenir l’état d’anarchie qui sévit dans le pays depuis mars 2011. Quel intérêt a le Qatar à ce que l’anarchie sévisse dans le monde arabe ? Aucun. Il est seulement tenu de respecter les ordres de ses protecteurs américains. Le cas de l’Arabie saoudite est différent. Ayant l’ambition d’une puissance régionale, ce pays n’est pas un simple pion entre les mains des Etats-Unis. En s’engageant fortement à côté de l’opposition armée syrienne, les Saoudiens poursuivaient leur propre agenda qui est de contrer l’Iran par tous les moyens, y compris par l’entrée en guerre contre les « Houthis », les alliés de Téhéran au Yémen. La crise de confiance qui obscurcit les relations américano-saoudiennes à la suite du rapprochement entre Washington et Téhéran s’est traduite par un rapprochement parallèle entre Ryad et Moscou. La récente visite du ministre saoudien de la défense en Russie où il a été reçu chaleureusement, s’est traduite par la conclusion d’importants accords relatifs à l’achat de 16 centrales nucléaires et de matériel militaire. Le rapprochement avec Moscou et les attaques répétées des terroristes de « l’Etat islamique » contre les Chiites saoudiens dans le but de déclencher des troubles confessionnels sont pour beaucoup dans le changement d’attitude de l’Arabie saoudite envers le régime syrien sans lequel le Secrétaire général de la Ligue arabe n’aurait pas exprimé aussi explicitement et aussi franchement son intention de coopérer avec le régime syrien et de rencontrer l’un de ses piliers, le ministre des Affaires étrangères Walid Al Moallem. Cette soudaine ouverture de la Ligue arabe est appelée à se renforcer au rythme de la fréquence et de la férocité des attentats terroristes comme ceux qu’on a observées à Sousse et au Koweït le 26 juin ou encore au Sinai, en Egypte, le 1er juillet. Mais l’élément moteur de cette ouverture reste la perspective terrifiante de voir les terroristes de l’Etat islamique occuper Damas et étendre leur « khilafa » sur tout le territoire syrien. Et à ce titre, ce n’est pas seulement la Ligue arabe qui devrait prendre langue avec le régime syrien, mais le monde entier. Entendons-nous bien. Bashar al Assad n’est pas un ange et son régime n’est pas ce qui convient le mieux pour le peuple syrien. Et si l’opposition dite modérée et démocratique était l’élément dominant dans la bataille, l’idée même de soutenir Bashar serait saugrenue et indécente. Mais le choix n’est plus maintenant qu’entre les coupeurs de têtes, les destructeurs de civilisations, les amis des ténèbres et les ennemis de la vie d’une part, et le régime syrien d’autre part. Contrairement à ce que prétendent certains opposants syriens reclus dans les grands hôtels d’Istanbul, ce choix n’est pas entre la peste et le choléra, mais entre la migraine et le cancer.