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Wednesday, October 14, 2009

Retour rapide aux vieilles habitudes

Les directions politiques palestiniennes établies à Gaza et à Ramallah sont à couteaux tirés. L’exacerbation des tensions entre le Hamas et le gouvernement de Mahmoud Abbas est telle que la réconciliation devient un mot vide de sens et que sa concrétisation s’éloigne chaque jour un peu plus. Comment peut-il en être autrement quand le Hamas traite le président palestinien de « traître » et que celui-ci qualifie la structure administrative à Gaza d’ « émirat obscurantiste » ? Comment peut-on espérer un accord inter-palestinien quand le Hamas accuse l’Autorité palestinienne d’être « à la solde d’Israël » et que celle-ci accuse les chefs islamistes au pouvoir à Gaza d’avoir « pris la fuite à bord d’ambulances », laissant les Gazaouis « seuls » sous les bombardements israéliens pendant la dernière guerre de décembre-janvier 2008-2009 ?
Le gouvernement de Benyamin Netanyahu a toutes les raisons de jubiler. Le déchirement inter-palestinien est une divine surprise pour Israël qui observe, tout en se frottant les mains, comment ses ennemis sont en train de perdre leur temps et leurs énergies à s’affaiblir mutuellement.
Certes, les déchirements inter-palestiniens ne sont pas une nouveauté. Il est arrivé que des militants palestiniens de différentes tendances politiques à bout d’arguments, règlent leurs différends par les armes. Le problème maintenant est que depuis juin 2007, deux autorités politiques se disputent la légitimité populaire et, du coup, toutes les énergies qui devraient être utilisées contre l’occupant sont gaspillées dans les querelles intestines qui ne servent que ceux qui occupent leurs territoires par la force depuis plus de 42 ans.
Avant même la soudaine irruption de la tension entre Gaza et Ramallah, les deux autorités établies dans ces deux villes palestiniennes sont de plus en plus déconsidérées sur le plan interne et international.
Depuis le coup de juin 2007, le Hamas s’accroche à un pouvoir qui ressemble à une coquille vide. En termes de moyens financiers et de forces de sécurité, il ne dispose pas du minimum requis pour exercer le pouvoir. Résultat : le peuple palestinien à Gaza est à bout de forces, victime à la fois des agressions militaires et du blocus économique d’Israël d’une part, et de l’entêtement des gens du Hamas à s’accrocher au pouvoir dont ils n’ont pas les moyens d’exercer, d’autre part. Pour se convaincre qu’ils sont au pouvoir, les responsables du Hamas, qu’ils soient à Damas ou à Gaza, font des discours et s’en prennent avec virulence au président Abbas et à son entourage.
Si la situation des Palestiniens de Cisjordanie est un peu moins dramatique que celle de leurs frères de Gaza, l’Autorité palestinienne ne s’en sort pas mieux que ses rivaux du Hamas. On peut même dire qu’elle se trouve dans une situation bien plus difficile. Elle est coincée entre les pressions combinées des Etats-Unis et d’Israël d’un côté, et ses responsabilités envers le peuple palestinien, de l’autre.
A un certain moment, en écoutant le nouveau président américain parler, le monde entier s’est mis à rêver de paix au Moyen-Orient. Le rêve n’a pas duré longtemps puisque tout le monde est en train d’observer avec frustration le « recul » de la Maison blanche par rapport aux positions exprimées sur la question au lendemain de l’élection de Barack Obama.
Celui-ci n’a même pas pu tenir bon sur la question du gel de la construction des colonies. Pire encore, exerçant des pressions intenses sur Mahmoud Abbas, il l’a forcé à faire le voyage à New York le mois dernier pour rencontrer Netanyahu dans le cadre du fameux « sommet tripartite » qui n’a servi qu’à prendre la photo d’un président palestinien très embarrassé tendant la main avec réticence au Premier ministre israélien.
Le sommet tripartite de New York n’était pas seulement inutile, mais contre-productif. Il a affaibli le président palestinien encore un peu plus vis-à-vis de son peuple, et a accru l’arrogance de Netanyahu et l’intransigeance de son gouvernement.
Les pressions américaines ne sont pas arrêtées là. Il y a quelques jours, Washington, sans doute sous la pression du Lobby, a forcé l’Autorité palestinienne à demander l’ajournement de la discussion du rapport Goldstone. Face aux critiques acerbes, l’Autorité a fait marche arrière. Mais le mal est fait, et Mahmoud Abbas est, encore une fois, affaibli pour avoir subi les intenses pressions américaines.
Que vise Washington par cette soudaine concentration des pressions sur la partie faible ? Quel message la Maison blanche veut-elle transmettre par sa démission face aux pressions israéliennes au point qu’elle n’aborde plus maintenant la question des colonies en termes de « gel », mais de « retenue » (restraint) ? Que gagnent les Etats-Unis en affaiblissant une Autorité palestinienne déjà faible et en donnant du grain à moudre à ses détracteurs ?
Sous l’évidente pression du Lobby, les Etats-Unis, après la tentative d’Obama d’impulser le processus de paix, semblent revenir avec une rapidité déconcertante à leurs vieilles habitudes : faire du sur-place en faisant croire qu’ils avancent. Comme ceux qui l’ont précédé, George Mitchell multiplie les tournées dans la région. En six mois, il a fait sept voyages, mais pas le moindre résultat. Comme ses prédécesseurs, Mitchell, en consommant des millions de litres de kérosène pour ses déplacements, est en train de contribuer beaucoup plus au réchauffement climatique qu’à celui de l’atmosphère politique au Moyen-Orient.

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