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Saturday, September 26, 2009

Les dessous de l'imbroglio nucléaire

Le président américain Barack Obama a de la suite dans les idées. A plusieurs reprises dans ses différents discours, notamment dans celui du Caire du 4 juin, il a appelé à un monde dénucléarisé. Le 24 septembre, en pleins travaux de l’Assemblée générale de l’ONU, il a présidé une réunion « exceptionnelle » du Conseil de sécurité consacré à ce sujet. Le Conseil a adopté à l’unanimité la résolution 1887 qui appelle à « prévenir la prolifération nucléaire en renforçant le régime multilatéral pertinent », à « promouvoir le désarmement nucléaire » et à « réduire le risque de terrorisme nucléaire. »
L’opinion publique mondiale ne peut pas ne pas constater qu’encore une fois, les débats au Conseil de sécurité sont biaisés, et encore une fois la règle des deux poids et deux mesures se révèle être l’instrument de prédilection de la plus haute instance internationale.
Les intervenants ont tapé fort sur les deux moutons noirs habituels de la communauté internationale, la Corée du nord et l’Iran, dont l’une possède une ou deux bombes et l’autre est encore très loin de l’enrichissement de l’uranium à 99,7% nécessaire à la bombe.
Un tintamarre assourdissant sur le « nouveau site nucléaire secret » annoncé en fanfare par Obama en Iran, mais toujours pas un mot sur Israël qui dort sur 200 têtes nucléaires. Un silence religieux continue à être observé sur ce dernier pays comme si la simple évocation des 200 têtes nucléaires israéliennes constitue un blasphème qui vaudrait l’enfer à celui qui le profère.
Celui qui a tapé le plus fort sur l’Iran est le président français, Nicolas Sarkozy, qui feint d’ignorer la responsabilité de la France dans la prolifération nucléaire au Moyen-Orient. Au moment où le monde entier, y compris les Etats-Unis, ne voulait pas entendre parler d’un Israël nucléaire, la France avait fait cavalier seul dans les années 50 et 60 du siècle dernier pour aider Israël à se doter d’un arsenal nucléaire. Et si cet arsenal n’a pas été utilisé jusqu’ici, il a sans aucun doute accru démesurément l’arrogance de ce pays, et l’a fortement motivé à s’engager dans des aventures militaires dévastatrices et à refuser de rendre les territoires acquis par la force.
Il est bien évident que l’arsenal nucléaire israélien est, au moins autant que le soutien inconditionnel américain, un puissant stimulant qui fait qu’Israël perpétue l’une des plus grandes injustices de l’histoire au mépris de la loi internationale. Le raisonnement que font les décideurs israéliens est simple : « Nous avons 200 têtes nucléaires, des armes conventionnelles efficaces, une armée puissante et la plus grande puissance de tous les temps nous soutient inconditionnellement. Pourquoi alors répondre aux appels de la communauté des nations ou se plier au droit international ? » De Golda Meir à Benyamin Netanyahu, en passant par les autres Premiers ministres israéliens, tous ont été animés par ce même raisonnement.
Si les Etats-Unis portent une part de responsabilité dans tout ça par le soutien inconditionnel qu’ils ne peuvent toujours pas refuser à Israël, la France n’en est pas exempte de par l’aide apportée à ce pays au niveau de la technologie nucléaire. Dès lors, il est illogique que les Etats-Unis et la France concentrent leur artillerie diplomatique sur l’Iran (la France avec plus d’ardeur encore si l’on en croit le journal « Le Monde ») et continuent d’ignorer le principal proliférateur nucléaire du Moyen-Orient.
Concédons que les grandes puissances sont motivées beaucoup plus par leurs intérêts que par la logique. Quels intérêts ont les Etats-Unis et la France à se montrer si partiaux devant le monde entier en faisant une fixation exclusive sur le programme nucléaire iranien ? Et à supposer que les Iraniens arrivent à produire une ou deux bombes nucléaires et qu’ils aient aussi les fusées nécessaires pour les délivrer, pourquoi devraient-ils les lancer sur les Etats-Unis, l’Europe ou même Israël, sachant pertinemment que s’ils lancent une tête nucléaire sur n’importe quelle cible, ils en recevront 100 en retour ? Personne, y compris les Israéliens, ne pense sérieusement que l’Iran prendrait un jour le risque de provoquer un holocauste nucléaire pour son peuple pour le simple plaisir d’envoyer une bombe sur Tel Aviv.
Ici, on ne peut s’empêcher de penser à l’ancien président Jacques Chirac qui, sur le même sujet, déclarait : « Ce n'est pas tant le fait que l'Iran possède une bombe nucléaire qui serait dangereux. Où l'Iran enverrait-il cette bombe? Sur Israël? Elle n'aura pas fait 200 mètres dans l'atmosphère que Téhéran sera rasée. Mais, ce qui est dangereux, très dangereux (…) c’est la prolifération nucléaire». On mesure ici le changement vertigineux en faveur d’Israël intervenu dans la politique étrangère française.
Le jeu est trop flagrant pour passer inaperçu. Israël et ses lobbies à travers le monde ont su exploiter efficacement l’aubaine inespérée qu’ils ont su s’offrir à partir de quelques centrifugeuses achetées par l’Iran pour son programme nucléaire « légal » et par les fanfaronnades déplacées du président Ahmadinejad. Le but de la manœuvre est clair : faire flèche de tout bois pour créer un « danger existentiel » pour Israël, ce qui permettrait de focaliser l’attention internationale sur ce prétendu danger et la détournerait des vrais dangers engendrés par la politique israélienne. Et Israël a d’autant plus besoin que l’attention du monde soit focalisée sur l’Iran qu’il est engagé dans un bras de fer avec son principal allié sur l’épineuse question des colonies.
Du côté des grandes puissances, le jeu est tout aussi clair. Aucune d’elle ne peut démontrer pourquoi ni comment l’Iran constitue un danger pour elle. Mais l’occasion est trop bonne pour être ratée. Les sanctions imposées à l’Iran ne visent pas seulement à obliger Téhéran à renoncer à son programme nucléaire, mais aussi, l'idée est ouvertement exprimée par certains dirigeants occidentaux, à exacerber les tensions intérieures dans l’espoir de provoquer un changement de régime.

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