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Wednesday, September 09, 2009

Pourquoi Netanyahu nargue-t-il la Maison blanche?

Encore une fois, Benyamin Netanyahu défie son principal allié, les Etats-Unis d’Amérique, en autorisant la construction de plusieurs centaines de maisons pour colons en Cisjordanie. Pourquoi cette arrogance ? Pourquoi ce mépris affiché par le gouvernement israélien à l’égard de tous ceux, Américains et Européens, qui le suppliaient non pas de démanteler les colonies, on en est loin, mais simplement de les geler pour un certain temps ?
Les Israéliens, citoyens et gouvernants confondus, ont eu largement le temps d’intérioriser l’idée qu’ils sont sérieusement « le peuple élu », donc au dessus des autres peuples. Dans leurs prêches, des rabbins vont même jusqu’à insister auprès de leurs fidèles que le versement du sang juif est un « sacrilège » qu’ils opposent à la banalité que revêt selon eux le versement du sang des gentils, c'est-à-dire des non juifs. Cette conviction est à l’origine de tous les abus, au premier rang desquels la volonté, manifestée par tous les gouvernements d’Israël de 1948 jusqu’à ce jour, de se mettre au dessus de la loi internationale. En d’autres termes, celle-ci, qui qualifie de crime de guerre la construction de colonies dans les territoires occupés, est valable pour tous les membres de l’ONU sauf Israël.
Le fait qu’aucune juridiction internationale n’a jamais osé inculper Israël de crimes de guerre, qu’aucune puissance influente dans le monde n’a jamais eu l’idée de frapper du point sur la table et dire « maintenant assez », est pour beaucoup dans le développement du sentiment d’impunité chez les Israéliens. Israël est un peu un diplomate mondial qui bénéficie d’une immunité mondiale qui le protège, quoiqu’il fasse, contre toute espèce de sanction.
Les vetos opposés systématiquement par Washington pour protéger son allié contre d’éventuelles sanctions, et même contre une simple condamnation verbale, ont alimenté à longueur d’années le sentiment d’impunité des Israéliens qui, en déclenchant des guerres, en dévastant des villes, en massacrant des civils ou en colonisant des territoires qu’ils ont occupés par la force militaire, savent pertinemment qu’ils ne seront jamais condamnés ni punis.
Pour perpétuer ce privilège de pays immunisé dont il est le seul à bénéficier dans le monde, Israël travaille sur deux fronts. A l’intérieur, l’épée de Damoclès est toujours bien aiguisée et prête à tomber sur la tête de quiconque dénonçant les crimes de guerre d’Israël ou demandant à ce que ce pays soit traité comme les autres au regard de la loi internationale. En effet, l’accusation d’antisémitisme, bien qu’éculée et usée jusqu’à la corde, constitue toujours un élément dissuasif important contre toute tentative de remise en cause du privilège de l’immunité.
Le second front se trouve à Washington, et plus précisément à K Street où l’AIPAC (American Israeli Public Affairs Committee) a pignon sur rue. On sait que ce puissant lobby joue parfaitement bien son rôle d’épouvantail face aux politiciens américains. On sait que nombre de politiciens américains ne peuvent rien contre l’obligation de voir leurs carrières passer par le filtre aipacien si l’on peut dire, qui favorise les pro- israéliens et barre la route à ceux dont l’intégrité empêche de cacher la tête dans le sable pour ne pas avoir à appeler un chat un chat.
Cependant, il se trouve qu’aujourd’hui, une fois n’est pas coutume, la Maison blanche est occupée par quelqu’un qui, s’il ne remet pas en cause le privilège d’immunité, demande un simple gel de la colonisation, mais avec une insistance qui déplait aux Israéliens et à leurs lobbies. Le président Barack Obama n’est ni anti-israélien ni pro-arabe. Son insistance sur le gel de la colonisation s’explique plutôt par sa conviction que le conflit israélo-arabe a trop duré, a assez menacé la sécurité internationale, qu’il est temps de résoudre ce drame et que le moindre préalable à toute tentative de règlement de ce conflit est le gel de la colonisation.
Israël et l’Aipac ne l’entendent pas de cette oreille évidement et le travail de sape a aussitôt commencé. Cette fois ils ont joué une carte maîtresse : dresser les deux composantes essentielles de l’establishment américain, la législative et l’exécutive, l’une contre l’autre.
On est habitué à voir les délégations du Congrès américain défiler en Israël. C’est devenu si banal que la plupart des médias ignorent l’information ou, dans le meilleur des cas, l’enterrent sous forme d’entrefilet en pages intérieures. Toutefois, en août dernier, la taille de la délégation du Congrès envoyée en Israël était telle qu’on a encore du mal à digérer l’information. La taille de cette délégation était si massive qu’elle ne peut avoir d’autre but qu’un étalage face à la Maison blanche de la puissance politique dont dispose Israël aux Etats-Unis.
Aucune autre explication n’est possible quand 13% de l’ensemble du Congrès, c'est-à-dire 56 de ses membres, accompagnés de leurs épouses, ne trouvaient rien d’autre à faire que d’aller sillonner Israël pendant près d’un mois. 25 congressistes républicains y ont séjourné du 2 au 13 août suivis par 31 démocrates à partir du 14 août. L’Aipac qui a organisé et payé les voyages est allé jusqu’à exiger que les deux délégations soient dirigées par les chefs des groupes républicain et démocrate au congrès, respectivement Eric Cantor et Steny Hoyer.
Quand 56 membres du pouvoir législatif, c'est-à-dire le principal pilier de la puissance américaine, font 20.000 kilomètres aller-retour rien que pour rassurer Israël et l’assurer que son immunité est intouchable, quelle réaction attendre de ce pays sinon plus d’arrogance et moins de flexibilité pour tout ce qui touche le conflit israélo-arabe. Qui peut s’étonner dès lors que Netanyahu nargue la Maison blanche et autorise la construction de milliers de maisons pour ses colons sur des terres qui n’appartiennent pas à Israël ?

1 Comments:

Blogger elgreco said...

bravo pour ton article
Le passe-droit et l'immunité acquise du Peuple qui se veut et croit élu ne peut indéfiniment croitre...
Si Obama ne réussit pas dégeler la chose il n'y aura plus jamais au grand jamais un Etat palestien...pourtant garant d'un Etat d'Israel!

12:57 PM  

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