airelibre

Sunday, June 28, 2009

Tienanmen 1989 – Téhéran 2009

Si l’Iran avait des relations normales avec les Etats-Unis et les pays européens, y aurait-il eu autant d’agitation médiatique et politique en Occident ? Probablement pas. C’est de bonne guerre. Quand quelque chose nous gêne, on souhaite sa disparition. Le régime iranien gêne le monde politique occidental, et celui-ci souhaite vivement le voir changé. L’excitation avec laquelle les reporters occidentaux ont couvert les événements iraniens et les réactions, rarement posées, des politiciens américains et européens cachent mal le désir intense de voir des hommes politiques plus modérés remplacer ceux qui détiennent aujourd’hui le pouvoir en Iran.
A force de prendre leurs désirs pour de la réalité, journalistes et politiciens occidentaux étaient portés le plus naturellement du monde à exagérer la force du mouvement protestataire et à sous-estimer celle du régime iranien et sa détermination à mettre au pas les manifestants anti-Ahmadinejad et pro-Moussaoui. Il y a 20 ans, en juin 1989, on avait assisté à la même surexcitation occidentale à l’occasion des événements de Tienanmen qui avaient secoué la Chine. Là aussi, à lire la presse d’Occident et à entendre les responsables politiques américains et européens, on avait l’impression que le régime chinois était à bout du rouleau et que les étudiants qui le contestaient étaient à deux doigts du pouvoir.
Il faut dire qu’en 1989, l’Occident était euphorique. L’Union soviétique était vaincue en Afghanistan et s’apprêtait à rendre l’âme. Les fissures dans le mur de Berlin étaient béantes et l’Allemagne se préparait à sa réunification après 44 ans de division humiliante. Les Etats-Unis caracolaient en tête des nations, ivres d’être désormais l’unique superpuissance au monde. Bref, en cette année charnière de 1989, Européens et Américains, citoyens et Etats confondus, avaient des raisons objectives de considérer que leur modèle économique et social était le meilleur puisqu’il avait eu le dernier mot dans la bataille politico-idéologique qui l’opposait pendant des décennies au « monde communiste » en général et à l’Union soviétique et ses satellites de l’Europe de l’est en particulier.
C’est dans un tel contexte qu’étaient intervenus les événements de la place Tienanmen à Pékin. L’ivresse des Occidentaux les avait alors empêchés de voir que les protestations estudiantines pour plus de liberté n’étaient qu’un simple feu de paille que le puissant Etat chinois allait facilement et rapidement éteindre. Ils avaient pris le monde communiste comme un bloc unique qui repose sur deux piliers, l’un à Moscou et l’autre à Pékin, et que l’effondrement du pilier moscovite entraînerait l’écroulement du pilier pékinois. Et ils étaient d’autant plus assurés que les événements de Tienanmen étaient perçus comme des fissures irréversibles et des signes avant-coureurs de la fin prochaine du régime chinois.
Les applaudissements et les encouragements que recevaient il y a vingt ans les étudiants contestataires chinois de la part des politiciens et des médias occidentaux n’exprimaient qu’en apparence le désir de voir les Chinois vivre plus librement et plus démocratiquement. Au fond, ce que désiraient ardemment les Occidentaux était l’effondrement d’un régime idéologiquement ennemi et son remplacement par un régime pro-occidental, peu importe qu’il serve ou non les intérêts du peuple chinois.
A ce point de l’analyse, les similitudes entre les événements de Tienanmen de 1989 et ceux de Téhéran cette année sont évidentes. L’Occident en général et les Etats-Unis en particulier ont un problème lancinant avec l’Iran depuis la victoire de la révolution islamique en 1979. Les choses se sont aggravées depuis 2006 quand la question de « la bombe iranienne » a fait irruption sur la place internationale pour devenir la principale pomme de discorde opposant Téhéran d’une part et Washington et Bruxelles de l’autre.
Depuis, le bras de fer engagé prenait, selon les circonstances, la forme de pressions politiques, de sanctions économiques et de menaces d’interventions militaires. Dans cette confrontation, Israël jouait les « Free lance » et poussait de toutes ses forces vers des bombardements massifs des installations nucléaires iraniennes dans le but de maintenir son monopole de l’arme nucléaire au Moyen-Orient.
Puis vint l’élection présidentielle iranienne. Sa contestation par une partie des Iraniens était la bonne surprise d’un Occident qui a commencé à fantasmer sur l’écroulement de la république islamique sous les coups de boutoir qu’elle subirait de l’intérieur. C’est ce fantasme qui explique l’euphorie et la légèreté avec lesquelles médias et politiciens en Occident ont couvert et commenté les événements de Téhéran. L’absence de lucidité a fait que l’essentiel soit oublié : les manifestants de Téhéran n’ont pas plus de force que ceux de Tienanmen et, face à la contestation, le régime iranien de 2009 est aussi puissant que le régime chinois de 1989.
Autre point essentiel que l’euphorie semble avoir fait oublier aux commentateurs occidentaux : les chefs de la contestation iraniens ne sont pas des opposants au régime, mais en font partie intégrante. Et on peut même dire que si Moussaoui avait remporté l’élection, rien ne prouve que les divergences entre l’Iran et l’Occident sur l’arme nucléaire seraient moins aiguës.
En attendant la prochaine crise, la question qui se pose est la suivante : Tienanmen 1989 et Téhéran 2009 serviront-ils de leçons à l’avenir pour que l’Occident adopte des analyses un peu plus lucides et un peu moins euphoriques ?

1 Comments:

Blogger beauchard said...

Analyse scandaleuse et inadmissible pour les morts et les victimes de ces manifestations et ceci au regard de la révolution tunisiennne....au moins avoir le COURAGE de la corriger!!!!

11:40 AM  

Post a Comment

<< Home