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Saturday, October 25, 2008

L’« effet Bradley » ? Pouquoi pas l’ « effet Jamaïque » ?

Les sondages publiés quotidiennement dans la presse américaine ne peuvent pas ne pas donner des insomnies à la paire républicaine John McCain et Sarah Palin. Mais dans leurs insomnies ces deux là ne peuvent pas ne pas s’accrocher comme à deux bouées de sauvetage à deux événements tirés de l’histoire des élections américaines et qui remontent l’un à 1948 et l’autre à 1982.
Le premier est connu sous le nom de « l’effet Truman ». Harry Truman, alors vice-président, était devenu le chef de la maison blanche à la mort de Franklin Roosevelt en 1945, à quelques mois de la fin de la deuxième guerre mondiale. Quand il se présenta aux élections de 1948, il était donné perdant par tous les sondages contre son rival, le républicain Thomas Dewey. Sa défaite était alors si évidente et si attendue que le « Chicago Tribune » avait titré dans son édition du 3 novembre 1948 « Dewey bat Truman ». A l’annonce des résultats officiels quelques heures plus tard, c’était Truman qui l’avait remporté. D’une courte tête, mais une victoire quand même. Et tous ceux qui détestaient l’homme, et ils étaient nombreux, avaient dû faire contre mauvaise fortune bon cœur et le supporter quatre ans de plus.
Le deuxième événement est connu sous le nom de « l’effet Bradley ». En 1982, Tom Bradley, maire démocrate de Los Angeles, menait une campagne réussie pour le poste de gouverneur de Californie contre le républicain George Deukejian. Tous les sondages prévoyaient une victoire massive de Tom Bradley contre son rival républicain. A l’annonce des résultats, et à la surprise générale, George Deukejian était déclaré vainqueur. Tom Bradley était noir…
Pour défendre leur profession, les sondeurs qui avaient tous donné le candidat afro-américain gagnant, avaient pointé du doigt à « la malhonnêteté de certains électeurs qui, au moment des sondages, disaient voter pour Bradley et une fois dans l’isoloir n’avaient pu se résoudre à voter pour un candidat noir. »
Le couple McCain et Palin ont tout essayé pour discréditer et salir le candidat démocrate en recourant aux mensonges, aux fabulations, aux manipulations au point que leur campagne était qualifiée de « campagne la plus abjecte » de l’histoire des élections américaines. Au point qu’un groupe d’universitaires américains, dégoûtés par tant de bassesse, avait rendu publique cette semaine une lettre demandant aux candidats républicains de mettre « un peu de moralité » dans leur campagne.
Barack Obama était tour à tour qualifié de terroriste, socialiste, marxiste, islamiste, arabe, ennemi de l’Amérique etc. Rien n’y fait. Plus les accusations pleuvent sur lui plus sa cote prend de l’altitude dans les sondages. Une bonne majorité des Américains savent sans doute que les méchancetés débitées par les candidats républicains contre leur rival n’ont pas de rapport avec la réalité et sont au mieux un moyen douteux utilisé par des gens déterminés a gagner à n’importe quel prix, et au pire le reflet d’un racisme primaire dont souffrent des personnalités pathologiques qui paniquent à l’idée de se faire battre par un métis.
En dépit d’une campagne abjecte donc, menée tambour battant contre lui, Barack Obama caracole dans les sondages et vient de recevoir le soutien de tous les journaux prestigieux américains : le New York Times, le Washington Post, le Los Angelers Times, le Boston Globe, le Chicago Tribune et des centaines d’autres journaux moins connus.
Les jeux sont-ils faits et Barack Obama sera-t-il le 44ème président des Etats-Unis ? Tous les signes le laissent penser et l’on peut dire raisonnablement que la crise financière qui ravage les Etats-Unis et le monde est le dernier clou enfoncé dans le cercueil du règne désastreux des républicains et que, par conséquent, les Américains n’ont d’autre choix que de l’enterrer s’ils veulent que les choses changent chez eux et dans le monde.
C’est parce qu’ils savent que les jeux sont faits, qu’ils ont épuisé toutes les munitions à leur disposition avec lesquelles ils ont tiré à boulets rouges contre le candidat démocrate que les responsables de la campagne républicaine s’accrochent désespérément à leur dernière trouvaille : « l’effet Bradley ». Ils ont dépoussiéré ce fait divers électoral qui date de plus d’un quart de siècle pour suggérer sournoisement une idée fondamentalement raciste qu’ils tentent de présenter sous la forme d’un slogan électoral : « dans l’isoloir, un Blanc ne votera pas pour un Noir. »
Mais les Américains, une fois dans l’isoloir, se soucieront sans doute de choses bien plus importantes que de « l’effet Bradley ». Ils auront en tête le mal inimaginable fait à l’Amérique et au monde pendant les huit ans de règne républicain. Ils auront en tête l’idée que l’élection de McCain ne serait rien d’autre que l’équivalent d’un troisième mandat pour George Bush. Ils auront en tête l’idée enfin que si McCain était élu, et, statistiquement, compte tenu de son âge, l’Amérique pourrait se trouver dans l’incroyable situation d’être gouvernée par la colistière de John McCain, Sarah Palin, qui a donné amplement la preuve de ne savoir ni ce qui se passe dans l’Alaska, Etat dont elle est gouverneure, ni même la différence entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.
Enfin, pour les Américains qui, une fois dans l’isoloir, ne peuvent s’empêcher de penser à « l’effet Bradley », ils sont invités à penser en même temps aux exemples des trois pays suivants : la Jamaïque, les îles Maurice et l’Inde. Le premier, noir à 95%, avait élu un Premier ministre blanc en 1980 et l’avait gardé en poste pendant dix ans. Le second, majoritairement noir, a élu un Premier ministre blanc d’origine française. Le troisième, à majorité hindoue, est dirigé par un Premier ministre sikh, a une blanche chrétienne d’origine italienne (Sonia Ghandi, la veuve de Rajiv) à la tête du plus grand parti politique du pays, et jusqu’à l’année dernière, il avait un président de confession musulmane.

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