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Tuesday, September 23, 2008

Une décision urgente s'impose

Pendant les 21 mois qu’elle a déjà passés à la tête du département d’Etat, Mme Condoleezza Rice s’est rendue 16 fois au Moyen-Orient et a préparé à grands frais et à grand renfort de publicité la conférence d’Annapolis dans l’Etat du Maryland à laquelle tous les protagonistes étaient conviés. Mais ni les voyages quasi-mensuels de la secrétaire d’Etat de George Bush chez les Israéliens et les Palestiniens, ni le grand show d’Annapolis n’ont eu la moindre utilité ni engendré le moindre résultat concret. Tel est le cas aussi des dizaines, peut-être des centaines, de réunions israélo-palestiniennes que ce soit entre Ehud Olmert et Mahmoud Abbas, ou entre les membres des multiples « commissions techniques » israélo-palestiniennes qui ont perdu leur temps à discuter des questions de l’eau, des frontières et de la sécurité.
On reste pantois face à un tel gaspillage d’argent, de temps et d’énergie. Pantois aussi face au paradoxe pathétique qui singularise les Etats-Unis, un pays qui a pu conquérir la lune en 1969, mais qui fait preuve d’une incapacité déroutante à jouer simplement les intermédiaires honnêtes et amener Arabes et Israéliens à signer enfin la paix. Il faut dire que si le lobby s’était opposé à la conquête de la lune avec le zèle et l’énergie utilisés à défendre l’occupation des territoires palestiniens, Neil Armstrong n’aurait probablement jamais marché sur la lune…
On se retrouve au point de départ après seize voyages stériles de Mme Rice au Moyen-Orient, une conférence qui a fait grand bruit mais qui a accouché d’une souris et des rencontres à n’en plus finir avec un Premier ministre qui s’est révélé corrompu et qui a fini par démissionner.
Encore une fois, les Palestiniens se retrouvent en train de tourner en rond. Encore une fois ils attendent la formation d’un nouveau gouvernement israélien. Et si Tzipi Livni n’arrive pas à s’entendre avec les travaillistes ni avec les partis orthodoxes, les Palestiniens se retrouveront encore une fois à attendre l’issue d’élections législatives anticipées qui, comme chacun sait, ne résoudront pas le problème chronique de l’instabilité gouvernementale en Israël.
La politique en Israël se joue presque à pile ou face. Tzipi Livni a gagné la présidence du parti Kadima avec une marge si mince que personne n’aurait été étonné de voir son rival Shaul Mofaz l’emporter. Sur les quelque 72. 000 membres de Kadima, seulement 39.331 ont pris la peine d’aller élire leur nouveau chef, et la nouvelle présidente élue ne l’a emporté que par la maigre marge de 431 voix.
Les Palestiniens préfèrent sans doute négocier avec Tzipi Livni plutôt qu’avec Shaul Mofaz. Celui-ci s’est montré tout au long de sa campagne intéressé uniquement par la sécurité d’Israël, comme un faucon de la pure tradition de la droite israélienne. Il ne veut entendre parler ni de paix avec les Palestiniens, ni de normalisation avec la Syrie et ne voit nul inconvénient à former une coalition avec l’extrême droite israélienne dont la principale caractéristique est l’hystérie anti-arabe. Il voue une passion pour la guerre et pousse de toutes ses forces vers une « attaque préventive » contre l’Iran, le pays où il est né et où il a vécu les premières années de son enfance.
Tzipi Livni, pour sa part, s’est présentée aux militants de Kadima comme une femme compétente et paisible qui a conduit plusieurs négociations avec les Palestiniens, une colombe qui préfère la paix à la guerre, la diplomatie à la violence et qui souhaite arriver à un accord définitif avec les Palestiniens.
L’expérience montre qu’en Israël les élections ne changent pratiquement rien. Une fois élu, le candidat se trouve dans l’impossibilité de réaliser ses promesses électorales parce qu’il découvre un système bloqué à la fois par la nature du système institutionnel israélien et par l’excessive fragmentation de la société politique israélienne, deux facteurs qui font qu’Israël ne peut être gouverné que dans le cadre d’une coalition. Celle-ci est forcément disparate où il n’est pas rare de voir le travailliste, l’orthodoxe et le représentant de la droite pure et dure occuper des fonctions dans le même gouvernement avec des vues fortement nuancées, voire contradictoires, sur des sujets vitaux pour le pays et pour la région.
Cette singularité qui caractérise la politique israélienne empêche la prise de grandes décisions, telle que l’évacuation des territoires arabes occupés et la signature d’accords de paix avec les Palestiniens et les Syriens. Mais cette singularité n’empêche pas les grandes décisions relatives à la guerre. Ce n’est pas étonnant quand on a en tête la tradition guerrière du pays, et surtout le fait que la guerre est un facteur d’unité en Israël, et la paix un facteur de division.
Mais les Palestiniens ne peuvent pas continuer éternellement à tourner en rond discutant stérilement avec le premier ministre en place en attendant que l’instabilité gouvernementale l’emporte et en amène un autre. Déjà dans l’entourage du patient président Mahmoud Abbas, des voix s’élèvent pour appeler à la dissolution de l’Autorité palestinienne et du retour au temps de l’administration israélienne afin que celle-ci, aux termes du droit international, assume ses responsabilités de puissance occupante.
Face au blocage qui s’éternise, il n’y a aucune raison pour que l’Autorité palestinienne continue à aider Israël à tromper le monde en lui faisant croire qu’il négocie pour la paix alors qu’en réalité il renforce chaque jour un peu plus son emprise sur les terres palestiniennes. Une décision vitale doit être prise de toute urgence. L’option d’obliger Israël à choisir entre un régime d’apartheid, un Etat binational laïque et démocratique ou la paix sur la base des résolutions 242 et 338 du conseil de sécurité de l’ONU apparaît de plus en plus inévitable pour briser le statut quo qu’Israël tente de perpétuer et que les Palestiniens veulent briser.

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