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Monday, October 06, 2008

Socialisme à l'américaine

A ce rythme, on va finir par ajouter un « s » et appeler les USA les USSA (United Socialist States of America). Beaucoup d’Américains le pensent très sérieusement et la célèbre chroniqueuse du New York Times, Maureen Dowd, connue pour sa critique corrosive du régime de George Bush, estime que le socialisme en Amérique n’est pas en train d’être imposé pas « des bolcheviques en jeans », mais par des cadres bon chic bon genre « en Gucci ».
Les morts, à la tête desquels le sénateur Joseph McCarthy, doivent se retourner dans leurs tombes. Celui-ci a cru devoir extirper les racines idéologiques du socialisme en Amérique en lançant sa célèbre campagne de « chasse aux sorcières » dans les années cinquante au cours de laquelle trop d’innocents ont perdu leur carrière, leurs familles et même leurs vies.
Une guerre froide aussi éprouvante que dangereuse a été menée de 1949 (date de la création de l’OTAN) à 1989 (date de l’effondrement du mur de Berlin) dans le seul but de protéger l’initiative privée à l’intérieur des frontières du « monde libre » et de maintenir ces mêmes frontières hermétiquement fermées au concept « subversif » de nationalisation.
Deux mandats successifs de George Bush ont non seulement fait perdre à l’Amérique sa puissance, son prestige et tous ses avantages stratégiques, mais l’ont traînée également dans une situation où elle n’a guère le choix que d’appliquer, la mort dans l’âme, le concept qu’elle exécrait hier : la nationalisation.
Car même si les politiciens et les médias évitent soigneusement de prononcer ce mot qui donne la chair de poule à l’Amérique, ce qui se passe aujourd’hui à Washington est bel et bien la nationalisation des banques et des compagnies d’assurance en faillite pour leur permettre de continuer à fonctionner et tenter de prévenir l’effet de cascade qui détruirait le système financier des Etats-Unis et mettrait en grave danger leur système économique. Rien que la nationalisation des géants de la banque (Fannie Mae et Freddie Mac) et de l’assurance ( American Insurance Group -AIG-) a siphonné à elle seule des dizaines de milliards de dollars d’argent public.
C’est une nationalisation d’un genre nouveau que le régime de Bush est en train de mettre en place à 12 ou 13 semaines de sa retraite. Il ne s’agit pas ici de prendre au domaine privé pour enrichir le domaine public, mais le contraire. Il est utile de rappeler ici le refus catégorique de George Bush d’aider les millions d’Américains pauvres à se doter d’une police d’assurance leur permettant de faire face aux frais insupportables des prestations des hôpitaux et des cliniques aux Etats-Unis. Il est utile de rappeler aussi son refus d’augmenter les dépenses en faveur du système éducatif public.
Ces refus de dépense fédérale en faveur de prestations sociales, très anodines sous d’autres cieux, rendent plus saisissante encore la rapidité avec laquelle l’administration Bush s’est lancée au secours des financiers de Wall Street. Un montage financier de 700 milliards de dollars a été mis au point dans un délai record et des pressions intenses ont été exercées sur le Congrès pour le voter.
L’extraordinaire dynamisme politico-financier dont l’administration Bush a fait preuve ces dernières semaines vise à sauver de la faillite des banquiers qui n’ont pas été victimes de quelque calamité inévitable ou d’une force majeure contre laquelle nul ne peut rien. Ces banquiers sont victimes de leur cupidité, de leur arrogance, de leur aventurisme et de leur engagement aveugle sur le terrain miné de la spéculation financière. Engranger le maximum et dans les délais les plus courts est devenu la devise des places financières et des banques aux Etats-Unis et en Europe. Aucune barrière morale ni juridique n’a résisté à l’orgie spéculative qui a saisi le grand capital financier dès les premiers jours de ce nouveau millénaire. Cette frénésie du gain a dénaturé les principes de base même du capitalisme puisque l’argent sert de moins en moins à créer la richesse à travers la production de biens, et de plus en plus à l’enrichissement facile, dangereux et immoral à travers la spéculation. Cette nouvelle tendance tend à faire du capitalisme une farce tragique qui fait quotidiennement des milliers de victimes parmi les honnêtes gens qui cherchent légitimement à devenir propriétaires d’un logement, pour ne prendre que cet exemple, mais qui tombent dans le piège infernal tendu par des financiers véreux.
A cet égard, il ne faut pas perdre de vue l’idée que l’origine du désastre financier actuel remonte à la crise des « subprimes ». Cette crise elle-même trouve son origine dans la cupidité des prêteurs à gages américains qui ont fait des offres de crédits en apparence alléchantes pour l’acquisition de logements à des citoyens dont les revenus ne permettent de rembourser ni le principal ni les intérêts. Les prêteurs à gages savent cela d’avance et tablent sur l’expulsion de l’acquéreur et la récupération de la maison au tiers ou au quart de son prix. Entre temps, le citoyen endetté perd toutes ses économies et se retrouve dans la rue sans même de quoi louer un toit pour lui et sa famille. Des centaines de milliers d’Américains ont ainsi été victimes de ce qu’il faut bien appeler l’escroquerie de ces financiers sans scrupules.
Ces « mauvaises dettes » sont devenues l’objet de spéculation ; elles se vendent et s’achètent entre banques. A cela s’ajoute les pertes colossales enregistrées par les milieux financiers du fait de la spéculation aventureuse et de décisions erronées qui ne s’expliquent que par la cupidité et le mépris de l’intérêt commun.
Les 700 milliards de dollars votés par le Congrès vont donc être utilisés par l’Etat fédéral pour acheter ces mauvaises dettes, et donc pour sauver des gens et des institutions qui ont fait trop de mal au pays et à son économie. Les citoyens américains ont raison de ressentir une amertume et de ne pas cacher leur ressentiment. L’injustice est trop grande pour être facilement supportée. Quand Wall Street Engrange les milliards et fait des bénéfices mirobolants, cela reste privé. Quand le système déraille et les pertes s’accumulent, cela devient public et le contribuable est appelé à la rescousse. L’injustice est trop grande pour être facilement acceptée. Au lieu de traîner les responsables du désastre en justice, on vole à leur secours en leur offrant les clés des caisses de l’argent public.

1 Comments:

Blogger Strategicus said...

good blog sir.i have invited you to join mine

salam

Agha
A.H Amin

3:29 PM  

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