airelibre

Wednesday, April 29, 2009

Les cent premiers jours d'Obama

Comme le temps passe vite. Cela fait 100 jours aujourd’hui depuis que Barack Obama a déménagé à la Maison blanche avec la ferme intention de réparer ce que son prédécesseur a endommagé et de remettre les Etats-Unis sur la juste voie, du moins telle que la conçoit la nouvelle administration, en termes de politique intérieure et étrangère.
L’une des particularités politiques aux Etats-Unis est de célébrer le centième jour du nouveau président, non pas en organisant des festivités populaires ou un cocktail à la Maison blanche, mais en utilisant cette étape symbolique pour faire un mini bilan de la nouvelle équipe. C'est-à-dire mesurer le décalage inévitable entre les promesses électorales et la pratique politique sur le terrain, ainsi que les degrés de changement et de continuité qui séparent ou qui lient la précédente administration et l’actuelle.
Au centième jour de son gouvernement, et en dépit de la grave crise économique et financière, la popularité de Barack Obama est assez élevée. 69% des Américains sont satisfaits de leur président. Il faut dire que son jeune âge et son expérience relativement limitée n’ont pas été un handicap pour le nouveau président qui semble très à l’aise dans sa fonction de chef de l’exécutif américain. On n’a eu à aucun moment l’impression que le jeune président bafouille ou cafouille ou panique face aux chantiers gigantesques qu’il est en train de piloter.
Le dossier de la crise économique lui a été légué par son prédécesseur. Cette crise s’est déclenchée en septembre 2008, du temps où Obama menait sa campagne électorale tambour battant. C’est donc George Bush qui a dû prendre les premières mesures pour sauver autant que faire se peut les banques au bord de la banqueroute et les entreprises menacées d’effondrement. A ce niveau, Obama s’est inscrit dans la continuité en poursuivant sur la voie inaugurée par Bush et qui consiste à injecter massivement de l’argent public pour sauver le capital privé.
Le dossier de la politique étrangère est différent. L’héritage légué par Bush est si désastreux qu’Obama a dû durant ses cent premiers jours mobiliser tout son talent et toute son énergie pour entamer le processus de normalisations des relations des Etats Unis avec le reste du monde, y compris avec les alliés européens ulcérés par l’arrogance et l’incompétence de l’administration Bush.
Au Moyen-Orient, on n’a constaté aucun changement notable. Il est vrai que les cent premiers jours d’Obama ont coïncidé avec des élections et la mise en place d’un nouveau gouvernement bien plus à droite que le précédent en Israël. Personne n’attend de percée substantielle dans le conflit israélo-palestinien, mais tout le monde attend le « clash » entre Obama et Netanyahu.
En Irak, le président américain semble coller à ses promesses électorales concernant le retrait progressif des troupes, mais la récente flambée de violence, si elle se poursuit, risque de forcer Obama à revoir son calendrier et à prolonger éventuellement la présence de ses soldats dans le bourbier mésopotamien. Sa marge de manœuvre est ici si étroite et dépend si fortement de l’évolution sur le terrain qu’il n’a aucune latitude de mener une politique différente de celle de son prédécesseur.
Un peu plus à l’est, en Iran, la situation demeure aussi complexe et aussi bloquée qu’elle l’était au temps de Bush. Certes, il y a un changement notable au niveau de la forme. Le langage a changé. Une main tendue au lieu des menaces de changement de régime et de bombardement proférées par Bush et Cheney. Mais le contentieux reste entier et la méfiance reste vive entre les deux parties.
Plus à l’est encore, en Afghanistan et au Pakistan, la complexité prend la forme d’un véritable casse-tête pour le président Obama. La situation dans ces deux pays est nettement plus dangereuse qu’elle ne l’était au temps de Bush. Les talibans afghans et pakistanais gagnent chaque jour un peu plus de terrain, ce qui n’inquiète pas seulement les Américains quand on sait que le Pakistan, que les illuminés de Beitollah Mehsud et d’Al Qaida cherchent à déstabiliser, possède un arsenal d’armes nucléaires. Par conséquent, la stratégie du président Obama dans cette région tourne autour d’un objectif central : empêcher que l’arsenal nucléaire pakistanais ne tombe entre les mains des ennemis des Etats-Unis.
Le voyage en Europe a été un grand succès populaire avec peu de résultats politiques. Obama n’a pu ni convaincre les Allemands de soutenir leur demande intérieure et limiter leurs exportations en direction des Etats-Unis, ni persuader les Européens de la nécessité de partager plus substantiellement le fardeau de la guerre d’Afghanistan.
Côté Chine et Russie, les cent premiers jours d’Obama n’ont encore apporté aucun changement notable par rapport à la politique de Bush vis-à-vis de ces deux pays. La Chine continue d’être à la fois le principal créancier de Washington et le plus grand exportateur de biens manufacturés vers le marché américain. Quant aux relations russo-américaines, elles sont toujours au point où Bush les a laissées. La discorde autour du déploiement en Pologne d’un système américain de défense anti-missile ne trouve toujours pas de solution, Moscou ayant refusé une proposition d’Obama de ne rien déployer en Pologne à charge pour la Russie de bloquer le programme nucléaire iranien.
Finalement, le seul changement substantiel opéré par Obama durant ses cent premiers jours concerne les relations turco-américaines. Ce n’est pas un hasard si la première visite du jeune président américain dans un pays musulman était en Turquie. Ce n’est pas un hasard qu’Obama ait insisté avec vigueur sur l’acceptation par l’UE de la candidature de la Turquie au point d’avoir agacé le président Sarkozy. Ce n’est pas un hasard non plus que Washington mette ses vaisseaux qui pourchassent les pirates somaliens dans l’océan indien sous commandement turc, ce qui est une première dans l’histoire de la marine américaine.
Les commentateurs américains sont un peu perplexes. Bien que la Turquie fût totalement absente de la campagne électorale d’Obama, celui-ci n’a pas manqué d’en faire une priorité en assainissant rapidement le contentieux qui a perturbé les relations turco-américaines du temps de Bush. La Turquie est un atout multiforme pour Washington. Il peut servir à contrebalancer l’Iran, à aider à la stabilisation de l’Irak, à sauvegarder les intérêts américains dans le Caucase et aider dans le processus difficile de normalisation entre Washington et Damas. Obama a compris cela et a agi en conséquence.

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