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Wednesday, December 26, 2007

Success Story

S’il y a un continent qui a su tirer les leçons de son histoire sanglante, c’est bien l’Europe. Durant des siècles, ce continent était engagé dans des guerres sanglantes et tous les prétextes étaient bons pour que les pays qui le composent se lancent dans un jeu de massacre effroyable. Il y avait les guerres de religion, les guerres de conquête, les guerres de vengeance, celles provoquées par la volonté de puissance etc…
La deuxième guerre mondiale avait fait à elle seule 60 millions de victimes et des destructions d’une ampleur inimaginable. C’était le choc qui secoua l’Europe et amena ses habitants à se dire trop c’est trop et que ça ne pouvait plus durer comme ça. Effectivement, ils étaient allés très loin dans la folie meurtrière et destructrice qui, de temps à autre, s’emparait de leur continent. En l’espace de deux décennies, deux conflits majeurs se déclenchèrent en Europe et s’étendirent à la majeure partie de la planète.
Alors que l’Europe n’avait pas encore fini de panser ses blessures et de reconstruire ce que la guerre de 39-45 avait détruit, ses politiciens avaient eu l’intelligence d’aller au fond des choses si l’on peut dire en se penchant sur la question du charbon et de l’acier. Pourquoi ces deux matières premières précisément ? Parce que sans charbon ni acier, il n’y aurait jamais eu de guerres meurtrières et destructrices de l’ampleur de celles observées au XIXe et XXe siècles. Le charbon alimente les hauts fourneaux qui font fondre l’acier. L’acier fondu est la matière première fondamentale des industries d’armements qui équipent les armées. Ce n’est donc pas sans raison que le charbon et l’acier ont toujours été considérés comme les deux piliers de la guerre.
Le 18 avril 1951, fut signé à Paris par l’Allemagne, la Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg et les Pays Bas, un traité instituant la « Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier » (CECA). Si l’idée première derrière la création de cette première institution européenne consistait à empêcher le réarmement de l’Allemagne par le contrôle strict de l’utilisation du charbon et de l’acier, le traité de Paris s’avèrera être la pierre angulaire sur laquelle allait être construite, lentement mais sûrement, une communauté prospère de 400 millions d’âmes vivant dans un espace de 3,6 millions de kilomètres carrés.
En effet, moins de six ans après, les signataires du traité de Paris signèrent le traité de Rome le 25 mars 1957, instituant la Communauté Economique Européenne (CEE). Douze ans après la fin d’une guerre dévastatrice, l’Europe franchit un pas décisif dans le sens de la coopération politique économique et commerciale. Le succès du traité de Rome est tel que la nouvelle communauté n’a cessé depuis de s’élargir.
Le 1er janvier 1973, les six deviennent neuf avec l’entrée dans la CEE du Danemark, de la Grande Bretagne et de l’Irlande. Ils deviennent dix le 1er janvier 1981 avec l’entrée de la Grèce, puis douze le 1er janvier 1986 avec l’entrée de l’Espagne et du Portugal.
Le 7 février 1992, les douze signèrent le traité de Maastricht, petite ville au sud de la Hollande, instituant l’Union Européenne (UE). Un nouveau pas dans l’intégration européenne fut franchi. La nouvelle institution, plus forte et plus confiante que jamais, continue d’absorber les pays européens les uns après les autres.
Le 1er janvier 1995, les douze de l’UE deviennent quinze avec l’entrée de l’Autriche, de la Finlande et de la Suède. Le 1er mai 2004, les quinze deviennent 25 avec l’entrée de Chypre, de l’Estonie, de la Hongrie, de la Lettonie, de la Lituanie, de Malte, de la Pologne, de la République tchèque, de la Slovaquie et de la Slovénie. Enfin le 1er janvier 2007, les 25 deviennent 27 avec l’entrée de la Bulgarie et de la Roumanie.
Le 1er janvier 1999 reste une date historique dans ce processus d’intégration. L’euro devient la monnaie unique des Européens. Certes quelques rares pays, comme la Grande Bretagne, ont préféré garder leur monnaie nationale, mais cela n’a pas empêché le fulgurant succès de l’euro qui, au moment de son lancement, valait un tiers de moins que le dollar et vaut aujourd’hui un tiers de plus.
Une autre date historique dans cette success story européenne : le 21 décembre 2007. Il y a moins d’une semaine, l’UE a étendu l’abolition des contrôles à l’intérieur de ses frontières à neuf de ses membres qui ont rejoint l’Union le 1er mai 2004 (un délai supplémentaire ayant été jugé nécessaire pour Chypre, la Bulgarie et la Roumanie). Huit des nouveaux bénéficiaires sont d’anciens membres du bloc soviétique. C’est dire le chemin parcouru non seulement depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, mais aussi depuis la fin de la guerre froide symbolisée par l’effondrement du mur de Berlin en 1989. Aujourd’hui, 400 millions d’Européens peuvent circuler librement dans un immense espace s’étendant de la Finlande et la Suède au Nord à l’Espagne et au Portugal au Sud et de la Hollande à l’Ouest à la Pologne à l’Est sans que quiconque leur demande leurs noms ni le contenu de leurs valises.
L’une des photos les plus frappantes, prise le 21 décembre dernier par Jens Koehler et distribuée par l’AFP, représente un soldat polonais retirant une section de barbelés à la frontière avec l’Allemagne. Cette photographie remet en mémoire une autre prise à la même frontière le 1er septembre 1939 et représentant les tanks des troupes hitlériennes fonçant sur la Pologne, déclenchant ainsi la deuxième guerre mondiale. Tout un symbole de l’immense chemin parcouru par l’Europe.

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