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Saturday, September 05, 2015

La hideuse vérité des deux lobbies

A première vue et en toute logique, quiconque chercherait à comprendre ce qui se passe aujourd’hui dans le monde arabe, pointerait du doigt « les échecs faramineux » de la politique étrangère américaine et la « stupidité » des stratèges de la Maison blanche et du Pentagone. Si l’on va plus loin dans la recherche et plus profondément dans l’analyse, on se rendra compte qu’il n’y a là ni échecs faramineux, ni stratèges stupides, mais une réussite éclatante de la politique étrangère américaine tracée par des stratèges qui, loin d’être stupides, sont dotés plutôt d’une intelligence et d’un savoir-faire diaboliques. On entend souvent çà et là que la politique étrangère américaine est une copropriété que se partagent le lobby militaro-industriel d’une part, et le lobby sioniste, défenseur du « Grand Israël » d’autre part. Aux yeux de beaucoup de monde de telles affirmations sont la reproduction de « clichés éculés » répétés inlassablement par les « ennemis » des Etats-Unis et d’Israël. Si l’on va plus loin dans la recherche et plus profondément dans l’analyse, on se rendra bien compte qu’il ne s’agit là ni de clichés ni de propos démagogiques, mais d’une réalité consternante. Car si le monde arabe aujourd’hui est déchiré par des drames de grande ampleur, si l’anarchie est quasi-générale, si les morts se comptent en centaines de milliers et les réfugiés et les déplacés en dizaines de millions, c’est parce que le complexe militaro-industriel et le lobby sioniste qui rêve d’ « Eretz Israël » ont gagné la partie et ont imposé à l’establishment washingtonien leur vue de la politique étrangère et leur conception de l’intérêt américain qui, soit dit en passant, est loin d’être celui du peuple américain. Pour comprendre les racines de la terrible anarchie qui règne aujourd’hui, il faut revenir un quart de siècle en arrière, et plus précisément à la fatale destruction du mur de Berlin qui mit fin à la guerre froide et provoqua alors une grande vague d’espoir parmi les peuples, et en particulier le peuple américain, le premier intéressé par ces changements gigantesques. Les citoyens américains célébraient l’événement avec allégresse, car ils croyaient que cela allait se traduire par une nouvelle ère de paix, par la fin du militarisme et, par conséquent, par des coupes substantielles dans le budget gigantesque du Pentagone. Bon nombre de citoyens croyaient qu’en toute logique ces coupes substantielles devraient normalement bénéficier aux programmes sociaux dont des dizaines de millions d’Américains, noirs et hispaniques surtout, en avaient bien besoin. Que nenni ! C’était sans compter avec la réaction des deux lobbies qui se trouvaient soudain en danger de paix, c'est-à-dire en danger de mort. Pour le complexe militaro-industriel, la paix dans le monde est la pire des choses qui puisse lui arriver, car cela signifie chute de la demande, marasme du marché de l’armement, fermeture d’usines, chute du chiffre d’affaires et des bénéfices. Bref, pour ce lobby la paix mondiale est un désastre à éviter à tout prix. Pour le lobby sioniste, la généralisation de la paix dans le monde n’est pas moins dangereuse. Une telle perspective laisse craindre une paix forcée entre Israéliens et Palestiniens et donc le retour d’Israël aux frontières du 4 juin 1967. Bref une telle paix signifierait la mort du sionisme et la fin du rêve du « Grand Israël ». Que faire alors face à ce danger mortel de la paix qui pointait à l’horizon des années 1990 ? Deux choses importantes : l’union sacrée des deux lobbies et la création en toute urgence de nouveaux ennemis. Pour la première chose, aucun problème. Ceux qui se ressemblent s’assemblent, a fortiori quand les deux intéressés sont menacés par le même « fléau ». Pour la seconde chose, aucun problème non plus. Un ennemi de perdu (l’URSS), dix de retrouvés (l’Irak, la Syrie, la Libye, la Corée du nord, le terrorisme international etc.). Reste à faire tourner la machine de propagande, et là aucune difficulté n’a été rencontrée par les lobbies qui ont à leur disposition des moyens financiers quasi-illimités et de grands médias internationaux qui obéissent au doigt et l’œil …et au dollar. Il n’a donc été guère difficile d’occulter la vérité qui veut que les deux lobbies sont en danger de paix et que, pour continuer à vivre, il leur faut des guerres à tout prix. Il n’a donc été guère difficile non plus d’exploiter la naïveté et l’ignorance de tout ce qui a trait à l’étranger des citoyens américains pour leur faire croire que leur mode de vie, leur liberté et leur prospérité sont en danger de mort. Il faut préciser ici que les deux lobbies ont reçu l’aide précieuse qui leur fut assurée par la stupidité immense et le fanatisme aveugle largement présents, il faut bien le dire, dans le monde arabe. La première aide décisive leur fut présentée sur un plateau d’argent par Saddam Hussein qui tomba tête première dans le piège tendu en envahissant le Koweït en août 1990, c'est-à-dire juste quelques mois après la chute du mur de Berlin. La seconde aide plus décisive encore fut présentée aux lobbies sur un plateau en or par la nébuleuse terroriste d’Al Qaida le 11 septembre 2001. La suite est connue. Si le monde arabe est aujourd’hui à feu et à sang, ce n’est pas à cause des « fautes commises » par les responsables de la politique étrangère américaine, mais parce que les plans et les politiques tracés par les stratèges au service des deux lobbies ont réussi au-delà de leurs rêves les plus fous. Les résultats sont bien là. Les ventes d’armes et les bénéfices financiers du complexe militaro-industriel n’ont jamais été aussi élevés. Quant au lobby sioniste, la question palestinienne qui lui a tant fait perdre le sommeil n’a jamais été aussi ignorée, négligée et marginalisée qu’elle ne l’est aujourd’hui.

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