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Sunday, October 06, 2013

Un petit tour du côté de Boston

Un tour dans les grandes villes américaines nous convainc très vite de deux des principales caractéristiques de l’Amérique : la trop grande richesse du pays et la trop petite solidarité entre les Américains. La trop grande richesse frise l’insolence, et la trop petite solidarité dépasse l’indifférence pour se traduire en arrogance. Le monde en général et le monde sous développé en particulier sont très habitués à l’arrogance d’une Amérique ivre de sa richesse et fière jusqu’à l’excès de sa puissante armée qu’elle n’a pas cessé depuis la fin de la deuxième guerre mondiale d’envoyer guerroyer dans les quatre coins du monde. Corée, Vietnam, Cambodge, Laos, Irak, Afghanistan, Somalie, Serbie et la liste est longue. Mais ce que l’on sait moins, c’est que les Américains sont aussi arrogants les uns vis-à-vis des autres et condescendants les uns vis-à-vis des autres. Pour s’en rendre compte, il suffit de faire un petit tour à Boston, l’une des plus grandes villes américaines située dans l’Etat du Massachussetts dans cette partie du nord-est de l’Amérique appelée New England (Nouvelle Angleterre). En effet, la modestie est loin d’être la première qualité des « Bostonians ». Le ton est donné dès la sortie de l’aéroport. Toutes les voitures immatriculées dans l’Etat du Massachussetts portent des plaques minéralogiques où sont inscrits en haut le nom de l’Etat, au milieu le numéro et, en bas et en italique : « The Spirit of América » (L’esprit –l’essence ?- de l’Amérique). Posez la question à un Bostonien : « Pourquoi vous vous considérez comme l’esprit de l’Amérique ? », et il ne trouvera aucune difficulté à vous donner les réponses convaincantes. D’abord, il vous prendra par la main et vous montrera une vieille bâtisse en brique rouge située à l’avenue Washington et vous dira d’un air fier : « C’est là où fut rédigée la Constitution américaine ». Il vous amènera ensuite dans une place animée et grouillante (la principale place commerciale de Boston), le Faneuil Market, et vous informera que c’est bien là que se sont tenus tous les meetings populaires du XVIIIe siècle contre l’occupation britannique, et c’est dans cette même place Faneuil au centre de Boston qu’est née pour la première fois l’idée d’un Etat américain indépendant. Il vous expliquera ensuite que Boston a la meilleure université (Harvard) et le meilleur institut technologique, le fameux MIT (Massachussetts Institute of Technology), pas seulement en Amérique, mais dans le monde. Il laissera entendre que la technologie est devenue une chose banale depuis belle lurette au Massachussetts. N’est-ce pas à Boston qu’Alexander Graham Bell a inventé le téléphone et qu’il a vérifié lui-même son invention en prononçant la fameuse phrase : « Watson, come here, I need you » (Watson viens ici, j’ai besoin de toi), et que son ami Watson qui était à quelques kilomètres de là, arriva en courant avec le combiné à la main, criant comme un fou « ça marche le téléphone » ? N’est-ce pas à Boston aussi que le 1er septembre 1897, la première rame du métro électrique avait été acclamée à la première lueur du jour par une foule enthousiaste et subjuguée ? Ce fut la première ligne de métro pas seulement à Boston, mais aussi en Amérique, et peut-être dans le monde. Boston donne l’impression d’une ville qui croule sous le savoir. A l’avenue Boylston, la bâtisse majestueuse de la « Public Library » est rendue plus majestueuse encore par la quantité et la quantité impressionnantes de livres qu’elle renferme. La vie culturelle y est intense. Les théâtres, les galeries d’art, la Boston Symphony Orchestra sont parmi les mieux réputés à tel point que Boston, qui n’est plus à un synonyme près, est appelée l’ « Athènes de l’Amérique ». Mais l’« Athènes de l’Amérique » a son côté sombre aussi. Elle a aussi ses pauvres, ses marginaux, ses chômeurs, ses sans-abris. Ceux-ci sont bien moins lotis et bien plus malheureux que leurs homologues, si l’on peut dire, de la Floride ou du Texas où les hivers sont nettement plus cléments que ceux de Boston balayée d’octobre à avril par les vents glaciaux du Grand Nord. Glen James est l’un de ces nombreux sans-abris qu’abrite Boston. Le 14 septembre dernier, il trouve un sac oublié. A l'intérieur : 2 400 dollars en liquide, 39 400 dollars en chèques et un passeport. Compte tenu de son extrême dénuement, Glen James aurait pu considérer la trouvaille comme un signe de la bonne volonté divine de lui venir en aide afin de pouvoir se payer un toit avant l’arrivée imminente du grand froid. Mais Glen James est un SDF pas comme les autres. Il prend le sac et la fortune avec et fonce vers le commissariat de South Bay Mall de Boston. La police bostonienne ébahie, entreprend la recherche du malheureux propriétaire et informe ‘The Boston Magazine’ de l’extraordinaire histoire de ce SDF qui, malgré son dénuement extrême, n’a pas gardé un sou des milliers de dollars cash qu’il a trouvés chez lui, c'est-à-dire dans la rue. Le web s’empare de l’affaire et les internautes de Boston sont en émoi. Glen James devient vite le « héros », le « symbole de l’honnêteté bostonienne ». Il a rendu 40.000 dollars à leur propriétaire, il en reçoit 60.000 collectés sur le web pour « récompenser » l’honnête SDF. Aujourd’hui, Glen James est l’un des hommes les plus honorés de Boston. Par son geste extraordinaire, il a démontré que si l’ « Athènes de l’Amérique » est arrogante et orgueilleuse jusqu’à l’excès, elle peut être aussi très honnête et même un peu généreuse.

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