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Friday, May 07, 2010

Reportage: IV-China connecting People

Han Hua se rappellera longtemps de cette « extraordinaire journée » du 12 février 2010. Comme tous les Chinois, elle devait passer les vacances du nouvel an lunaire en famille, et sa famille à elle se trouve à Wuhan. Le nouvel an tombait le dimanche 14 février et Han Hua, cadre commercial dans une grande société chinoise, se trouvait alors Guangzhou, à 1068 kilomètres de sa famille. Elle était l’une des centaines de millions de personnes qui s’apprêtaient à entreprendre ce qui est désormais connu en Chine et à l’étranger comme « la plus grande migration humaine rituelle. »
Le train « classique », si l’on peut dire, relie Guangzhou à Wuhan en 11 heures. Mais comme deux mois plus tôt, en décembre 2009, fut inaugurée la nouvelle ligne de train à grande vitesse entre ces deux villes, Han Hua n’avait mis que trois heures et quelques minutes pour arriver chez elle.
« C’était magnifique, j’avais gagné huit heures de plus auprès de ma famille grâce à ce train d’une étonnante rapidité », explique cette jeune femme frêle et dont le sourire ne quitte jamais les lèvres. Le TGV Guangzhou-Wuhan est aujourd’hui le train le plus rapide du monde puisqu’il roule à une moyenne de 330 kilomètres/heure, avec des pointes de 350. « Plus rapide que l’avion au moment du décollage », s’émerveille Han Hua, visiblement fière des performances technologiques de son pays.
Pays immense (plus de neuf millions de kilomètres carrés), la Chine est déterminée à réduire les distances faramineuses qui séparent ses grandes villes. Et pour cela, il faudrait une modernisation totale du réseau ferré chinois. Cette modernisation prend des proportions stratégiques puisque les autorités chinoises ont jugé nécessaire de créer un ministère autonome qui s’appelle le Ministère des Chemins de fer.
Il n’est pas facile en Chine de rencontrer des responsables ministériels et de leur poser des questions sur les dossiers ou les chantiers qui relèvent de leur ministère, même si c’est pour aider à les faire connaître à l’étranger. Après maints efforts, un responsable au Ministère des Chemins de fer à Pékin, M. Wang Suyi, a bien voulu nous consacrer un quart d’heure pour nous éclairer un peu sur l’immense chantier ferroviaire à travers lequel la Chine vise à relier la plupart de ses villes par un réseau de trains à grande vitesse.
« Notre pays est immense », affirme M. Suyi, « il est à peu près de la taille des Etats-Unis. Avec des distances aussi grandes à parcourir entre les villes chinoises, l’avion n’est pas le meilleur moyen pour une population aussi nombreuse que la nôtre. Par conséquent, notre stratégie a été de doter le pays de moyens de transport avec des vitesses qui se rapprochent de celles l’avion, mais avec des capacités en matière de transport des passagers autrement plus grandes et des prix de billets nettement plus réduits. Et ce moyen approprié est le train à grande vitesse. »
Les ambitions de la Chine dans ce domaine semblent démesurées, mais ce pays a les moyens techniques et financiers pour se les offrir : 42 lignes TGV d’une longueur totale de 13000 kilomètres sont planifiées pour « les trois prochaines années ». Compte tenu de la nature des terrains, parfois escarpée et montagneuse, compte tenu des tunnels et des ponts innombrables à creuser et à construire, trois ans sont très peu pour l’accomplissement d’un travail aussi titanesque, mais M. Wang Suyi est confiant.
« Actuellement », dit-il, « les lignes TGV Guangzhou-Wuhan (un millier de kilomètres) et Pékin-Tiangin (120 kilomètres) sont opérationnelles. La ligne Pékin-Shanghai (1300 kilomètres) sera prête l’année prochaine et plusieurs autres lignes sont déjà en chantier. » Les chiffres donnés par M. Suyi sont édifiants et justifient l’optimisme chinois de terminer une large partie, si ce n’est la totalité, des 42 lignes TGV dans trois ans : rien que pour la ligne Pékin-Shanghai, plus de 100.000 ouvriers, techniciens et ingénieurs travaillent jour et nuit sur le projet et l’Etat chinois a mis à la disposition du ministères des Chemins de fer la somme vertigineuse de 300 milliards de dollars. A titre d’exemple, la ligne opérationnelle Guangzhou-Wuhan a coûté 17 milliards de dollars…
Forte des moyens financiers et technologiques, la Chine affiche des ambitions ferroviaires qui débordent ses propres frontières. Les Chinois se sont déjà mis à construire les infrastructures nécessaires aux trains à grande vitesse dans d’autres pays comme la Turquie, l’Arabie Saoudite et le Venezuela. D’autres candidats sont sur les rangs pour bénéficier de la technologie chinoise dont …les Etats-Unis.
« Au début du XXe siècle », explique M. Wang Suyi avec un large sourire, les Chinois ont contribué à doter les Etats-Unis d’un réseau ferroviaire. Des milliers de travailleurs chinois ont construit des centaines de kilomètres de rails. En ce début du XXIe siècle, les Chinois remettent ça, mais cette fois non pas en tant que travailleurs, mais en tant que maîtres d’œuvres. »
En effet, la Chine a signé un accord de coopération ferroviaire avec l’Etat de Californie et la compagnie américaine General Electric. « Nous sommes intéressés par le marché américain des trains à grande vitesse qui est très sous-développé », explique notre interlocuteur. « Leur première ligne à grande vitesse qui reliera Orlando à Tampa en Floride et qui mesurera moins de 100 kilomètres ne sera pas prête avant 2013 ou 2014. Mais ce marché est très prometteur et la Chine peut fournir aux Américains autant de lignes TGV qu’ils veulent. Les négociations avec la Californie pour la construction d’une ligne TGV entre San Francisco et Los Angeles sont assez avancées et le gouverneur Arnold Schwarznegger a fait part de son désir de visiter la Chine pour activer le projet. »
Mais les ambitions ferroviaires de la Chine sont d’une ampleur planétaire, selon des citoyens chinois avec qui nous avons parlé de ce sujet. Chen Yuxiang, journaliste à Xinhua parle de connexion par TGV entre Shanghai, Singapour et New Delhi à travers la Birmanie. Plus à l’ouest, notre collègue chinois parle de connexion entre Pékin et Moscou, et une autre, plus au sud de la planète, à travers l’Iran entre Pékin, Prague, Berlin et peut-être même jusqu’à Londres…
Prié de confirmer ces informations, M. Wang Suyi répond que « de telles idées existent et il y a même quelques ébauches de plans. Ce n’est pas une question d’années mais de décennies. »

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