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Wednesday, August 01, 2012

Echéances électorales et appréhensions gouvernementales

Si l’on en croit les présidents du gouvernement et de l’Assemblée constituante, il ne nous reste plus que sept mois pour nous engager dans les élections qui devraient nous doter de structures constitutionnelles, étatiques et gouvernementales durables. Mustapha Ben Jaafar et Hamadi Jebali ont affirmé que c’est au mois de mars que nous élirons nos gouvernants durables qui succèderont aux gouvernants provisoires actuels. Mais plus le temps passe plus cette promesse s’avère peu crédible, et il est fort probable qu’elle finira par n’engager que ceux qui y ont cru. En effet, seulement sept mois nous séparent du mois de mars prochain, et l’on n’a ni Constitution, ni instance indépendante pour organiser ces élections, ni listes électorales à jour, ni loi électorale. Imaginez quelqu’un qui n’a ni terrain, ni matériaux de construction, ni plan béton, ni plan architectural, ni autorisation de construire et qui se promet d’habiter chez lui dans sept mois et de rompre définitivement avec le calvaire que lui font subir les gérants d’immeubles. Voilà à peu près la situation dans laquelle se trouve le Tunisien. Car, les gérants provisoires de l’Etat ne font rien pour permettre aux citoyens d’accomplir leur devoir électoral par lequel seront mises en place les structures durables du pouvoir en Tunisie afin, que l’on puisse se pencher sérieusement sur les problèmes économiques et sociaux dont la constante aggravation menace l’avenir immédiat du pays. On ne se permet pas de lire dans les intentions de nos gouvernants provisoires, mais il est évident qu’ils ne sont pas animés de la meilleures des volontés pour accomplir la tache principale pour laquelle ils ont été élus : doter le pays d’une Constitution et préparer le passage en douceur d’une situation politique provisoire à une autre qui soit durable et caractérisée par la démocratie, un large éventail de libertés et, bien sûr et surtout, les conditions d’une alternance au pouvoir saine et paisible. Mais force est de constater que les responsables politiques provisoires de la troïka ont comme une appréhension à l’égard de l’échéance électorale que les Tunisiens attendent avec impatience. Cette appréhension s’explique par le doute croissant que les détenteurs actuels du pouvoir soient reconduits dans leurs fonctions. Pour certains, ce doute est même une certitude au vu de l’absence de la moindre réalisation à mettre au crédit de ce gouvernement provisoire, et compte tenu de la situation désastreuse que vivent les deux partis « décors » alliés à Ennahdha. D’aucuns se demandent pourquoi le gouvernement de Béji Caid Essebsi a pu organiser avec succès les élections du 23 octobre et le gouvernement Jebali traîne les pieds et tarde à mettre en place les conditions nécessaires à l’organisation des prochaines élections ? La raison réside dans la différence fondamentale entre les deux gouvernements. Celui de Béji Caid Essebsi avait pris l’engagement qu’il ne se présentait pas aux élections, et cette neutralité lui avait permis d’organiser convenablement les premières élections libres et transparentes du pays et de transmettre le pouvoir aux vainqueurs. Ce n’est pas le cas du gouvernement Jebali qui semble obsédé par els résultats des prochaines élections. Cette obsession est clairement lisible dans la déclaration du président du gouvernement à l’ouverture du 9e congrès du parti dont il est issu : « L’urgence des urgences » a dit Hamadi jebali « est de gagner les prochaines élections avec une marge confortable. » Tout est là. La mauvaise volonté dont fait preuve ce gouvernement est devenue réellement inquiétante vu qu’il tarde exagérément à s’acquitter de sa responsabilité quant aux préparatifs des élections. Si M. Jebali pense ou craint que les prochaines élections ne lui assurent pas la victoire « avec une marge confortable », ce n’est pas une raison pour ne pas les organiser à temps. Si la bonne volonté était générale dans ce pays, nous aurions été appelés à voter en octobre prochain, étant entendu qu’une année est largement suffisante pour rédiger une Constitution et mettre en place une instance indépendante et une loi électorale et mettre à jour la liste des citoyens en âge et en droit de voter. Or à ce rythme, ce ne sera ni octobre, ni mars. Peut-être serions-nous appelés à voter au plutôt en octobre 2013, comme le prédisent déjà certains observateurs. C'est-à-dire deux ans après l’installation au pouvoir des gouvernants provisoires qui, encore une fois, n’ont pas été élus en octobre 2011 pour gouverner, mais pour doter le pays d’une Constitution. L’appréhension du gouvernement vis-à-vis de cette échéance électorale est telle qu’il n’a pas hésité à changer une équipe qui gagne. Oui, l’équipe de Kamel Jendoubi, réunie au sein de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (isie) a fait un travail remarquable en 2011 et accumulé une expérience et un savoir-faire de nature l’habiliter à organiser les prochaines élections. Or, le gouvernement Jebali a non seulement ignoré ces compétences, mais il les a même pas consultées pendant la préparation de son projet de loi relatif à la création d’une nouvelle instance qui sera soumis à l’Assemblée constituante. Evidemment, ce gouvernement s’est arrogé le droit de présenter tout projet de loi qui lui passe par la tête et de le présenter à l’Assemblée constituante, comptant sur une majorité qui a acquis le regrettable réflexe de voter comme un seul homme pour tout projet présenté par le gouvernement. A voir les débats et les séances de vote transmis par la deuxième chaîne, on se demande des fois si l’on n’est pas en présence de la triste Chambre des députés du temps de Ben Ali, sauf que l’opposition n’est plus un objet de décor, mais une force réellement combative. On attend avec impatience la loi créant l’instance qui organisera les prochaines élections. Le gouvernement et sa majorité au sein de l’Assemblée constituante sont sur ce point précis sous haute surveillance pas seulement de la part des partis d’opposition, mais aussi de la société civile dans son ensemble. Si les forces vives dans ce pays n’ont pas protesté face à la volonté gouvernementale de mettre fin à l’activité d’une « équipe qui gagne », elles n’accepteront sûrement pas de voir remplacer M. Jendoubi et ses amis par d’autres moins indépendants et moins compétents. Œuvrer dans ce sens revient à jouer avec le feu et à jeter el discrédit sur les prochaines élections avec toutes les conséquences sur la transition politique et sur la paix civile.

2 Comments:

Blogger Marianne said...

Oui, pourquoi pas reprendre l'ancienne Isie qui a fait ses preuves comme vous le dit, on gagnerait beaucoup de temps et de l'argent. Un invité sur RTCI a bien dit à ce sujet: "à quoi bon de vouloir réinventer la roue..."
Et c'est la même chose pour la nouvelle constitution.
Les mauvaises intentions d'Ennahda sont à bcp de reprises visibles, dernier truc d'eux: au lieu de l'égalité de la femme ils veulent introduire "la complémentarité" de la femme...
Pendant ce temps Mr.Rafik Abdesselem veut rapprocher les relations économiques entre les îles Seychelles (80000 habitants)
et la Tunisie...
En fait, dans mes rêves les plus fous je n'aurais jamais imaginé un tel développement en Tunisie.
Un penseur algérien a une fois dit:
il suffit d'envelopper une idée dans un habit religieux pour convaincre les arabes de la suivre."
Espérons qu'une force politique convaincante se formera d'ici les prochaines élections qui sera un vrai contre-poids au parti Ennahda

5:24 PM  
Blogger Marianne said...

Oui, pourquoi pas reprendre l'ancienne Isie qui a fait ses preuves comme vous le dit, on gagnerait beaucoup de temps et de l'argent. Un invité sur RTCI a bien dit à ce sujet: "à quoi bon de vouloir réinventer la roue..."
Et c'est la même chose pour la nouvelle constitution.
Les mauvaises intentions d'Ennahda sont à bcp de reprises visibles, dernier truc d'eux: au lieu de l'égalité de la femme ils veulent introduire "la complémentarité" de la femme...
Pendant ce temps Mr.Rafik Abdesselem veut rapprocher les relations économiques entre les îles Seychelles (80000 habitants)
et la Tunisie...
En fait, dans mes rêves les plus fous je n'aurais jamais imaginé un tel développement en Tunisie.
Un penseur algérien a une fois dit:
il suffit d'envelopper une idée dans un habit religieux pour convaincre les arabes de la suivre."
Espérons qu'une force politique convaincante se formera d'ici les prochaines élections qui sera un vrai contre-poids au parti Ennahda

5:25 PM  

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