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Tuesday, December 28, 2010

2010: Un bilan en demi-teinte

Dans quatre jours, l’année 2010 fera partie de l’histoire et l’on entamera une nouvelle année. L’année 2010 n’a pas connu d’événements catastrophiques majeurs semblables au tsunami de 2004 en Indonésie ou à l’invasion de l’Irak un plus tôt. Toutefois, la nature et les hommes ont continué au cours de l’année qui s’écoule à provoquer ici et là des dégâts, transformant la vie de millions de gens en enfer.
La nature a été particulièrement inclémente avec Haïti et le Pakistan. Le premier fut frappé en janvier par un séisme dévastateur qui avait fait des milliers de morts et des millions de sans-abris dans l’un des pays les plus pauvres de la planète, et le second fut dévasté en juillet-août par des inondations bibliques qui ont ramené le pays plusieurs années en arrière.
Les Pakistanais auraient été heureux s’ils n’avaient affaire qu’au déchaînement des forces de la nature. Les hommes au Pakistan sont plus cruels. En effet, il ne passe pas de jour sans qu’un kamikaze ne se faufile au sein d’une foule de citoyens et ne se fasse exploser, emportant avec lui des innocents dont l’unique tort est de s’être trouvé dans l’endroit choisi par l’illuminé. Près de 1400 personnes sont mortes en 2010, un record depuis la transformation des talibans pakistanais en mouvement terroriste majeur dont le but est de déstabiliser le pays et détruire son régime politique.
Juste à côté du bourbier pakistanais, le bourbier afghan bât lui aussi des records en 2010 en nombre d’attaques sanglantes contre les forces étrangères et en nombre de morts parmi elles. Autour de 700 soldats américains et de l’Otan sont morts cette année, nettement plus que les 521 morts enregistrés en 2009, elle-même année record sur ce plan. Les 30.000 soldats supplémentaires envoyés par Obama au début de l’année n’ont pu renverser la tendance, comme l’espérait la Maison blanche.
En Irak, « toutes les unités combattantes » sont parties en août dernier et le reste partira la fin 2011. La situation sécuritaire s’est fortement améliorée en dépit de quelques attaques qui se déroulent de temps à autre et par lesquels Al Qaida, apparemment aux abois, tente désespérément de signifier qu’elle est toujours là. Les forces de police et l’armée irakiennes semblent maintenant capables de prendre elles-mêmes en charge la sécurité dans le pays. Le signe le plus significatif à cet égard est la réussite par les forces irakiennes d’assurer seules la sécurité des millions de pèlerins qui, chaque année, convergent vers Karbala pour se lamenter sur la mort de Hussein. Cette année, aucun incident majeur n’a troublé la célébration de l’Achoura.
Sur le plan politique, l’impasse résultant des élections du printemps dernier en Irak a duré de mars à décembre. Il a fallu attendre tout ce temps pour que les différents partis politiques arrivent à un accord minimal qui a finalement ouvert la voie à la formation d’un gouvernement de coalition.
Au Moyen-Orient, ce n’est pas l’impasse du processus de négociations israélo-palestiniennes qui a focalisé l’attention mondiale. Cette impasse est devenue la règle puisque ce processus n’a pas avancé d’un iota depuis son déclenchement en 1991. Ce qui a fait l’événement plutôt cette année, c’est cette étrange volonté de Washington de faire n’importe quoi pourvu que soit donné au monde l’illusion que le processus de paix est en cours. Obama n’a pas hésité à proposer un pot de vin à Netanyahu de 71.428.571 dollars par jour (selon les calculs d’un quotidien britannique), en contrepartie d’un simple gel de la construction dans les colonies pendant une période de 3 mois. Netanyahu a refusé cette offre mirobolante et les Etats-Unis ont reconnu, face à un monde ahuri, leur échec d’obtenir une si insignifiante concession de la part d’Israël, même en y mettant le prix fort. La construction des colonies dans les territoires occupés palestiniens a repris depuis octobre à un rythme effréné.
Toujours au Moyen-Orient, l’événement stratégique de l’année est la dégradation brutale des relations israélo-turques, suite à l’attaque le 31 mai par un commando israélien du Mavi Marmara qui a fait plusieurs morts dont 7 de nationalité turque. Depuis, Ankara ne cesse d’exiger des excuses et des réparations et Israël ne cesse de refuser.
Concernant le dossier du nucléaire iranien, le bras de fer continue d’opposer les Iraniens aux Occidentaux après la volte-face d’Obama et le refus de la Maison blanche de la médiation du Brésil et de la Turquie. L’attaque israélienne tant redoutée contre les installations nucléaires iraniennes n’a pas eu lieu cette année, mais le danger n’a pas disparu entièrement, les Israéliens pouvant à tout moment allumer un incendie qui mettrait la région à feu et à sang.
En Asie, la montée en puissance de la Chine continue de provoquer des inquiétudes et des remous stratégiques en Extrême-Orient. L’année 2010 a été marquée par une crise diplomatique grave entre Pékin et Tokyo qui a engendré un resserrement des liens nippo-américains, après une timide et éphémère tentative du gouvernement Hatoyama de s’ouvrir sur l’Asie et de réduire la présence et l’influence américaines au Japon. Toujours en Extrême-Orient, Séoul et Pyongyang étaient à deux doigts de la guerre, les deux Corées s’accusant toujours mutuellement de tous les maux et menaçant l’une l’autre de « représailles dévastatrices ».
L’Union européenne, en dépit de la crise de l’euro et des problèmes financiers aigus de certains de ses membres, poursuit son chemin de développement paisible loin du bruit et de la fureur qui sévissent ailleurs. Elle n’est pas immunisée contre les menaces terroristes, mais a réussi jusqu’à présent à démanteler des réseaux et à faire avorter des complots dont le dernier, qui vient d’être éventé en Grande Bretagne, aurait pu être dévastateur.
En Afrique, l’élection présidentielle en Guinée a réussi à résoudre la grave crise politique déclenchée par le coup d’état de Moussa Dadis Camara. Les Ivoiriens n’ont pas été aussi chanceux que les Guinéens. L’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, censée résoudre la longue crise politique du pays, l’a au contraire aggravée. La politique du « J’y suis, j’y reste » de Laurent Gbagbo risque de déclencher une nouvelle guerre civile, replongeant le pays dans un chaos qui a marqué le pays durant plus d’une décennie.
La nouveauté dans la crise ivoirienne est la mobilisation de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CDEAO). Face à l’incroyable obstination de Laurent Gbagbo de garder un pouvoir qui ne lui appartient pas et de défier le monde entier, la CDEAO menace de le déloger par la force. Si elle le fait, ce sera alors un changement politique majeur qui révolutionnera les relations interétatiques en Afrique. Bonne Année.

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